LE DON DE SCIENCE (SAINT THOMAS D'AQUIN)

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Message  ROBERT. Mar 26 Oct 2010, 8:07 pm

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LE DON DE SCIENCE (SAINT THOMAS D'AQUIN) Saint_10


IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

De là il faut passer au don de science.

A ce propos quatre questions se posent :

1. La science est-elle un don ?

2. Est-elle tournée vers le divin?

3. Est-elle spéculative ou pratique?

4. Quelle béatitude y répond ? [30]


note explicative :


[30] Qu. 9, prol. — Cette science, qui sera uniquement celle des âmes saintes, est présentée comme un rameau du don d'intelligence. Comme lui, elle s'enracine dans la vie de la grâce. Comme lui, elle s'épanouit dans une connaissance inspirée et instinctive qui participe de la manière même de Dieu. Elle fructifie enfin dans certaines vues et dans certains sentiments plutôt amers qu'exprime bien la béatitude des larmes. Du côté du sujet, voilà les symptômes du don de science (art.1; art. 3, sol. 3; art. 4).

— Du côté de l'objet, les voici : La science est tout occupée de juger ce qui n'est pas Dieu, à la différence de la sagesse qui ne sait plus voir que Dieu (art. 2). Cependant elle est pour la contemplation avant d'être pour l'action, bien qu'elle serve à l'une et à l'autre (art. 3).

— Nous touchons là le point de doctrine où saint Thomas a changé d'avis. Aux Sentences et encore dans la Morale Générale de la Somme il pense que l'intelligence et la sagesse sont réservées pour la contemplation, la première pour appréhender et la seconde pour juger ce qui est, tandis que le conseil et la science sont attachés à l'action, le premier pour discerner et la seconde pour décider ce qui est à faire.

Désormais, il relève le don de science au rang des dons de sagesse et d'intelligence et il le réhabilite pour la contemplation. Il est fait pour nous inspirer le bon jugement des créatures, non moins que leur bon usage. A cette doctrine s'ajoute l'appui de l'expérience des saints : ils ont en effet, d'une manière souvent bien remarquable, un juste et vrai savoir des choses de ce monde, en même temps qu'ils en font un bon et saint usage.

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Message  ROBERT. Ven 29 Oct 2010, 7:40 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 1. La science est-elle un don ?

DIFFICULTES : 1. Apparemment non, car les dons de l'Esprit-Saint dépassent la faculté naturelle, tandis que la science n'est qu'un certain effet de la raison naturelle. Une démonstration est effectivement, au dire du Philosophe, "un syllogisme qui fait savoir". La science n'est donc pas un don de l'Esprit-Saint.

2. D'ailleurs les dons de l'Esprit-Saint sont, avons-nous dit, communs à tous les saints. Or saint Augustin affirme que "la plupart des fidèles ne sont pas très forts dans la science bien qu'ils soient très forts dans la foi elle-même". C'est donc que la science n'est pas un don.

3. Enfin, le don est plus parfait, avons-nous dit, que la vertu. Un seul don par conséquent suffit à la perfection d'une vertu. Or à la vertu de foi répond, comme nous l'avons vu, le don d'intelligence. Ce n'est donc pas à elle que répond le don de science. On ne voit pas non plus à quelle autre vertu il puisse répondre. Comme les dons sont pourtant les perfections des vertus, il semble donc que la science ne soit pas un don.


CEPENDANT en Isaïe la science est bien comptée parmi les sept dons.


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Message  ROBERT. Ven 05 Nov 2010, 8:26 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 1. La science est-elle un don ? (suite)


CONCLUSION : La grâce est plus parfaite que la nature, elle ne va donc pas se trouver en défaut là même où l'homme peut par nature être parfait. Or, lorsque l'homme avec la raison naturelle adhère en toute intelligence à une vérité, il est doublement parfait en face de cette vérité-là : d'abord, parce qu'il la saisit; puis, parce qu'il a sur elle un jugement certain.

Voilà pourquoi deux choses aussi sont requises pour que l'intelligence humaine adhère d'une manière parfaite à la vérité de foi. L'une des deux est qu'elle saisisse sainement ce qui est proposé : cela regarde, comme nous l'avons dit, le don d'intelligence. Mais l'autre est qu'elle ait un jugement sûr et droit en la matière, c'est-à-dire jusqu'à discerner ce qui doit être cru d'avec ce qui ne doit pas être cru : c'est pour ceci que le don de science est nécessaire. [31]





note explicative :


[31] Qu. 9, art. 1, concl. — Ce petit exposé contient un important principe dont il est fait sur-le-champ une belle application. Le tout est limpide.

— Le principe est qu'il y a plus dans la grâce que dans la nature. Par une juste analogie de proportion, on peut donc mesurer les richesses de l'une par celles de l'autre, et on est en droit d'attendre de la première plus qu'on n'obtient de la seconde, pour tout ce qui est de la vie de l'âme.

— L'application est celle-ci. Si la nature donne vraiment de l'intelligence, ce n'est pas seulement pour assurer la première opération de l'esprit, c'est aussi pour assurer la seconde : bien penser, c'est d'abord bien saisir ce dont il est question, c'est ensuite bien juger ce que c'est en réalité. Si la grâce donne aussi de l'intelligence, cette grâce ne fera pas moins dans son ordre que la nature ne fait dans le sien : au don de première intelligence qui permet de capter et de pénétrer déjà ce que Dieu a dit, s'ajoute celui de seconde intelligence qui permet de bien juger ce que tout cela est en réalité.

Ainsi, dans la lumière de la grâce, tout un bon jugement est donné aux saintes âmes : il est de science s'il s'exerce sur le créé, de sagesse s'il s'élève à l’Incréé. Cette science et à plus forte raison cette sagesse auront donc pour effet de pousser davantage l'esprit d'intelligence à l'intérieur, pour ainsi dire, et comme vers l'essence même des choses de la foi. L'on sait quoi, homo scit quid (art. 1, sol. 2; art. 2, sol. 1). Par cette science, on aura notamment le don de démêler, en connaissance de cause, quoi on doit croire, scire quid credendum (art. 2, sol. 1) et quoi on ne doit pas croire

— A ce jugement deux qualités sont attribuées, la certitude et la rectitude. Ce n'est pas synonyme. La rectitude désigne l'exacte conformité à ce qui est : un jugement droit est celui qui s'ajuste bien à la réalité et la suit notamment jusque dans ses causes, comme va le rappeler l'article 2; c'est la justesse de l'esprit. La certitude désigne plutôt la satisfaction et le repos de l'esprit dans cette parfaite conformité à ce qui est en réalité.



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Message  ROBERT. Sam 20 Nov 2010, 8:18 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:



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QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 1. La science est-elle un don ? (suite)


SOLUTIONS : 1. La certitude de la connaissance se rencontre dans les diverses natures diversement suivant la condition diverse de chaque nature. Ainsi, l'homme aboutit à un jugement certain au sujet d'une vérité par le mouvement discursif de la raison, et c'est pourquoi la science humaine s'acquiert par raison démonstrative. Mais en Dieu il y a un jugement certain de vérité sans aucun mouvement discursif, par simple intuition, comme nous l'avons vu dans la Première Partie, et c'est pourquoi la science divine n'est ni discursive ni raisonneuse mais absolue et simple. C'est à elle que ressemble cette science qui est comptée comme un don de l'Esprit-Saint : elle est effectivement une certaine ressemblance en participation de la science divine elle-même. [32]


2. Dans les choses de la foi il peut y avoir une double science. Il en est une par laquelle on sait ce qu'on doit croire, en distinguant bien ce qu'il faut croire d'avec ce qu'il ne faut pas croire : c'est en ce sens que la science est un don et convient à tous les saints. Mais il y a dans les choses de la foi une autre science par laquelle non seulement on sait ce qui doit être cru, mais on sait aussi manifester la foi, amener les autres à croire et réfuter les contradicteurs : cette science-là est rangée parmi les grâces de gratification, et n'est pas donnée à tous mais à certains.

D'où cette parole que saint Augustin ajoute à la suite de celle citée : "Autre chose est de savoir uniquement ce qu'on doit croire, autre chose de savoir comment cela même peut venir en aide aux personnes pies et être défendu contre les impies". [33]


3. Les dons sont plus parfaits que les vertus morales et que les vertus intellectuelles. Mais ils ne sont pas plus parfaits que les vertus théologales. Au contraire, tous les dons sont plutôt tournés vers la perfection des vertus théologales comme vers une fin. Aussi n'y a-t-il aucun inconvénient à ce que divers dons soient ordonnés à une seule vertu théologale. [34]




notes explicatives :



[32] Qu. 9, art. 1 sol. 1. — Cette science inspirée ressemble à la science même de son divin inspirateur. Dieu aussi porte son jugement sur toute chose : il le fait sans aucun mouvement de recherche, par un simple regard pénétrant. Le jugement des saints emprunte quelque chose de ce regard de Dieu. Il ne s'obtient point par les détours de la raison. Il est donné à la manière d'un instinct, sous ta forme d'intuitions simples, qui sont comme la continuation même du don d'intelligence.


[33] Qu. 9, art. 1 sol. 2. — Science éminemment participée de l'Esprit-Saint, elle est formellement réservée à l'esprit des saints. Mais tous ceux qui possèdent ce premier fond de sainteté qu'est l'état de grâce sont aussi en possession d'un premier fond de cette science. Cette science minima, selon saint Thomas, permet aux saintes gens de se reconnaître et de se mouvoir à l'aise parmi les choses de la foi, en démêlant quoi croire et quoi ne pas croire. C'est déjà beaucoup. Et cependant ne minimisons pas ce minimum. Cette science est largement accordée aux bonnes âmes, elle leur permet de comprendre comment la foi donne du prix à tout.

— Cette science qui fait partie de la grâce sanctifiante dans une âme doit être d'une autre sorte que celle qui fait partie des grâces édifiantes dans l'Eglise. Saint Thomas suggère ici et nous dirons plus loin quels rapports il peut y avoir entre ces deux sciences; elles s'éclaireront ainsi l'une l'autre.



[34] Qu. 9, art. 1, sol. 3. — Rien n'est plus grand dans l'ordre de la grâce et de l'union à Dieu que les vertus théologales. Celles-ci ne sont pas au service des dons. Ce sont les dons qui sont à leur service à elles. Par conséquent les dons annexés au service de la foi ne viennent pas modifier dans l'Eglise l'économie de la révélation ni atténuer dans chaque âme la vertu de la foi. Tout au contraire, ils sont faits pour aider les croyants à mieux se soumettre au régime de la révélation et à faire de plus beaux actes de foi.

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Message  ROBERT. Mar 14 Déc 2010, 8:30 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:



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QUESTION 9.

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ARTICLE 2. Le don de science est-il tourné vers les réalités divines ?

DIFFICULTÉS : 1. Apparemment oui, puisqu'au dire de saint Augustin c'est par la science qu' "est engendrée, nourrie et fortifiée la foi". Mais la foi regarde bien les réalités divines, parce qu'elle a pour objet, comme il a été établi, la Vérité première. Le don de science est donc aussi en matière de réalités divines.


2. Le don de science a d'ailleurs plus de dignité que la science acquise. Mais il y a une science acquise qui est occupée des réalités divines, comme fait la science de la métaphysique. Le don de science est donc beaucoup plus en matière de réalités divines.


3. Enfin, comme il est écrit aux Romains, "les aspects invisibles de Dieu sont vus et compris par le moyen de ce qu'il a fait". Si donc la science s'attache aux réalités créées, il semble que ce soit pour s'attacher aussi aux réalités divines.


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Message  ROBERT. Sam 18 Déc 2010, 7:56 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.


ARTICLE 2. Le don de science est-il tourné vers les réalités divines ? (suite)


CEPENDANT saint Augustin dit ceci : "Que la science des réalités divines soit appelée proprement la sagesse, mais que celle des réalités humaines garde proprement le nom de science".


CONCLUSION : Le jugement certain sur une réalité est surtout donné d'après la cause de cette réalité. Voilà pourquoi il faut que l'ordre des jugements soit conforme à celui des causes. Comme la cause première est en effet cause de la seconde, on juge de la cause seconde par la cause première; mais on ne peut juger de la cause première par une autre cause. C'est pourquoi le jugement que l'on fait par le moyen de la cause première est le premier et le plus parfait. [35]

— Or, là où il y a un plus parfait, le nom commun du genre est donné en propre à ce qui est en deçà de ce plus parfait, tandis qu'un autre nom, un nom spécial, est adapté à ce plus parfait. Cela se voit en logique : en effet, dans le genre des termes convertibles, celui qui signifie "ce que c'est" qu'une chose est appelé d'un nom spécial, la définition, tandis que les convertibles restant en deçà de cela retiennent pour eux le nom qui leur est commun, c'est-à-dire qu'ils sont appelés les propres.

— En conséquence de cela, étant donné que le nom de science implique, avons-nous dit, une certitude dans le jugement, si cette certitude est produite par le moyen de la plus haute cause, elle a un nom spécial qui est celui de sagesse. Est en effet appelé sage dans un genre l'homme qui connaît la plus haute cause dans ce genre-là, celle qui permet de pouvoir juger de tout. Tout simplement même est appelé sage celui qui connaît la cause tout simplement la plus haute, à savoir : Dieu. Voilà pourquoi la connaissance des choses divines est appelée la sagesse. En revanche, celle des réalités humaines est appelée la science : c'est pour ainsi dire le nom commun, il implique la certitude du jugement et il reste attribué en propre au jugement qui est formé par le moyen des causes secondes; c'est pourquoi, à prendre ainsi le nom de la science, on obtient un nom distinct de celui de sagesse. De là ce don de science qui est borné uniquement aux réalités humaines ou même aux réalités créées. [36]





notes explicatives :


[35] Qu. 9, art. 2, concl. init. — Méditons ici l'axiome familier aux anciens et méconnu des modernes : "SAVOIR VRAIMENT UNE CHOSE C'EST EN CONNAITRE LES CAUSES". Le nom même de science, dit saint Thomas implique la certitude dans le jugement. Il n'y a d'ailleurs une certitude proprement dite que là. Car, si on se borne à la première opération de l'esprit, on est surtout impressionné de ce qui frappe l'entendement, on est sous l'action de ce qui vient à la pensée, tandis qu'à la seconde opération il y a une véritable réaction de l'esprit par laquelle il se dit à lui-même ce qu'il en est en réalité, et c'est là qu'est le jugement. Observons qu'il n'y a pas de discontinuité entre les deux opérations; cette même activité mentale qui est d'abord simple intelligence se développe en manière de jugement.

A ce moment, l'esprit se prononce jusqu'à affirmer l'existence et les conditions d'une chose : jugement d'existence, disent les modernes. Il s'avance même jusqu'à affirmer la nature de la chose, assurant qu'elle est ceci ou cela : jugement de valeur, font les modernes. C'est alors qu'on se déclare certain. Or, on ne l'est vraiment qu'en connaissance de cause. Et voilà pourquoi l'ordre des jugements est modelé sur celui des causes.


[36] Qu. 9, art. 2, concl. fin. — Un tel jugement est une science s'il demeure attaché à la connaissance des causes secondes. Il est la sagesse s'il s'élève à la considération de la cause première. Si cela est vrai dans l'ordre des connaissances naturelles, ce doit l'être à plus forte raison dans l'ordre des connaissances surnaturelles. Il importe en effet beaucoup à la vie de la grâce que les saintes âmes aient par instinct un bon jugement en tout ce qui se rapporte à la voie du salut.
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A suivre…


Dernière édition par ROBERT. le Mar 21 Déc 2010, 2:13 pm, édité 1 fois (Raison : parenthèse)
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Message  ROBERT. Mar 21 Déc 2010, 2:21 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:



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QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.


ARTICLE 2. Le don de science est-il tourné vers les réalités divines ? (suite)


SOLUTIONS : 1. Bien que les choses qui sont la matière de la foi soient des réalités divines, des réalités éternelles, cependant la foi elle-même est quelque chose de temporel dans l'esprit du croyant. C'est pourquoi il appartient au don de science de savoir quoi on doit croire. Mais il appartient au don de sagesse de savoir les réalités mêmes que l'on croit, de les savoir en elles-mêmes par une certaine union à elles. Par là le don de sagesse répond plutôt à la charité qui unit à Dieu l'esprit de l'homme. [37]


2. La raison alléguée là est valable en tant que le nom de science est pris dans un sens général. Mais ce n'est pas dans ce sens-là que la science est rangée comme un don spécial, c'est dans le sens restreint d'un jugement formé par le moyen des réalités créées. [38]


3. Ainsi qu'il a été dit plus haut, toute habitude dans l'ordre de là connaissance regarde formellement ce qui sert de moyen pour connaître quelque chose, et matériellement ce qui est connu par ce moyen. Et, comme le formel a plus d'importance, il s'ensuit que ces sciences qui concluent en matière physique d'après des principes mathématiques, sont plutôt comptées au nombre des mathématiques comme ayant avec elles plus de ressemblance, bien que par leur matière elles se rapprochent plutôt de la physique, ce qui fait que le second livre des Physiques dit qu'elles sont "plutôt sciences physiques". Voilà pourquoi lorsque l'homme connaît Dieu par le moyen des réalités créées, c'est plutôt de la science, semble-t-il, puisque cela se rattache à la science par le côté formel, que ce n'est de la sagesse, puisque cela ne se ramène à la sagesse que matériellement. Et, à l'inverse, lorsque nous jugeons des réalités créées d'après les réalités divines, c'est plutôt de la sagesse que de la science. [39]





notes explicatives :


[37] Qu. 9, art. 2, sol. 1. — Si tout est divin dans la foi, comment se fait-il qu'une science ajoutée à cette foi puisse n'avoir pour objet que des réalités créées ? L'objection est spécieuse. Elle nous invite à faire un retour sur tout ce qui a été dit des éléments constitutifs de la foi aux premières questions du traité. Deux choses, on doit s'en souvenir toujours, constituent la foi : la proposition extérieure, l'adhésion intérieure. La proposition contient en effet des réalités divines, des réalités éternelles; au fond, elle ne contient même que cela, à savoir : le mystère de la vie même de Dieu et aussi celui de notre vie en Dieu. Mais l'adhésion de notre part est nettement quelque chose de créé et de temporel, c'est quelque chose qui se forme et qui grandit en notre esprit, c'est du divin encore, mais du divin participé dans de l'humain. Et c'est là précisément que la vertu de foi a bien besoin du don de science, pour prendre conscience de ce qu'elle doit être dans la qualité foncière de son adhésion et dans la pureté de ses différents actes : le vrai croyant, s'il aime son Dieu, reçoit l'inspiration de bien juger ce que c'est que croire et quoi on doit croire.

— D'ailleurs, à reprendre les choses du côté même de la proposition divine, on y trouve aussi du créé, du contingent, de l'humain. La révélation de Dieu a toute une histoire mêlée à celle même de l'humanité et attachée aux contingences de ce bas monde. Si l'on relève tous les instruments dont Dieu s'est servi pour se faire entendre parmi les hommes, on est en présence d'un monde de causes secondes, qui sont au service de la Cause première agissant ici comme Vérité première. Toutes ces causes secondes font aussi partie de la foi. Il nous faut donc les recevoir à bon escient, les estimer à leur juste prix, juger à quel titre elles sont le véhicule et assurent la tradition des vérités divines.

Et cela est aussi le rôle du don de science : l'auteur ne le dit pas à cet endroit, mais le dira à l'article suivant, lorsqu'il attribue au jugement de cette science non pas seulement les choses à croire mais tout ce qui en est l'accompagnement ou la suite. Le fait est qu'il y a là tout un réseau à démêler. Savoir par où la proposition divine a cheminé jusqu'à nous, savoir comment elle s'affirme à nous, c'est le complément de savoir en quoi et comment s'opère notre adhésion à elle. Dans toute la force du mot et de la chose, c'est vraiment savoir quoi croire. Pour un pareil discernement, il faut prolonger la finesse du don d'intelligence dans la justesse du don de science.


— La fin de la réponse ouvre même la voie au don de sagesse. Dès qu'une âme se sent pour ainsi dire transportée dans la foi et encline à en scruter les principales réalités par une sorte d'affinité avec elles et d'union à elles, c'est que la sagesse entre en jeu. Car Dieu est tout dans la foi; il est le fond de tout; il est tous les compléments du verbe croire, nous a dit saint Thomas; partout c'est lui qui est en cause. Voilà pourquoi, si, sur un point quelconque je creuse un peu, c'est Lui que je trouve, et alors, si j'ai une âme aimante, ce n'est plus seulement la science qui me guide, c'est la sagesse. Bien que cette sagesse soit, elle aussi, une perfection de l'intelligence et un secours pour la foi, c'est plutôt à la charité qu'elle se rapporte, car on ne connaît à un certain degré d'intimité que si on est uni d'amitié; or il n'y a que la sainte charité qui mette l'homme assez en amitié avec Dieu pour susciter cette sagesse qui lui fasse tout voir et tout goûter en Dieu. Précieuse réflexion qui est au beau milieu de la foi comme une première invitation à la sagesse, laquelle sera le couronnement de la charité.


[38] Qu. 9, art. 2, sol. 2. — Dans la vie de la grâce, la science et la sagesse ne sont pas si séparées qu'il y ait un temps pour l'une et un temps pour l'autre. Elles n'ont pas non plus de champs si distincts qu'on puisse toujours distinguer ce qui revient à l'une et à l'autre. Cependant saint Thomas pense que ce sont bien deux inspirations différentes qui ne sont pas données en même proportion aux mêmes âmes et qui sont vouées à deux fonctions assez différentes pour laisser à chaque don sa physionomie propre. La physionomie du don de science est celle que dépeint le texte : la finesse de l'intelligence alliée à la justesse du jugement, dans l'enchaînement des causes secondes; telles qu'on les sait incorporées à la foi ou, au contraire, indifférentes, étrangères et même hostiles à cette foi, la science des saints les dépiste et les discerne.


[39] Qu. 9, art. 2, sol. 2. — Entre la science et la sagesse voici un raffinement de distinction. Il achève de peindre l'une et l'autre. Ce qui caractérise chaque habitude de connaissance, c'est le moyen dont elle use formellement, plus que ce qu'elle a en vue matériellement. Ainsi il arrive à la science de remonter des créatures jusqu'à Dieu comme il arrive à la sagesse de s'abaisser de Dieu jusqu'aux créatures. On peut donc penser que l'une et l'autre embrassent matériellement les créatures et Dieu. Mais elles le font sous deux aspects formellement différents et d'un regard qui n'est point le même. La sagesse voit tout sous l'angle de l'Incréé; la science, tout sous l'angle du créé. Si celle-ci est menée jusqu'à Dieu, c'est par le jugement même qu'elle porte sur le néant et l'insuffisance des créatures. Si celle-là est ramenée vers le créé, c'est par tout ce qu'elle sait de la perfection même de Dieu. La sagesse fait goûter Dieu jusqu'en ce qu'il fait. La science dégoûte des créatures, à mois qu'elles ne mènent à Dieu.


— S'il plaît à quelque perspicace étudiant de poursuivre ici la comparaison entre ces dons de science et de sagesse et les vertus acquises de même nom, je lui suggère de se demander si la distinction signalée par l'auteur n'est pas plus tranchée entre les dons qu'entre les vertus. Dans celles-ci il semble qu'on doive toujours s'élever progressivement et comme insensiblement des sciences à la sagesse : on dit même que, SI UN PEU DE SCIENCE ÉLOIGNE DE DIEU, BEAUCOUP DE SCIENCE Y RAMÈNE; il n'y a pas de métaphysique en soi, ni de sagesse a priori, la vraie sagesse humaine n'est jamais que l'aboutissant de l'expérience et de la science. Tandis que par les dons le sage peut dès l'abord s'établir en Dieu : il est vrai que c'est aussi grâce à une sorte d'expérience du divin, mais elle peut être donnée d'un seul coup.
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Message  ROBERT. Mer 22 Déc 2010, 8:42 pm

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ARTICLE 3. Le don de science est-il science pratique ?


DIFFICULTES : 1. Il en a bien l'air. Saint Augustin dit en effet qu' "à la science est députée l'action par laquelle nous nous servons des réalités extérieures". Mais, une science à laquelle est confiée une action, c'est bien une science pratique. Cette science qui est le don est donc bien une science pratique.

2. Saint Grégoire affirme à son tour que "la science est nulle si elle n'a pas l'utilité de la piété, et la piété tout fait inutile si elle est dépourvue du discernement de la science". D'où l'on tient que la science a la direction de la piété. Mais cela ne peut pas convenir à une science spéculative. La science qui est le don n'est donc pas spéculative mais pratique.


3. D'ailleurs, les dons du Saint-Esprit ne sont possédés que par les justes, comme nous l'avons établi plus haut. Mais la science spéculative peut être possédée même par ceux qui ne sont pas des justes, selon cette parole de saint Jacques : "Quand quelqu'un sait le bien et ne le fait pas, c'est un péché pour lui". La science, lorsqu'elle est le don, n'est donc pas spéculative mais pratique.

CEPENDANT saint Grégoire dit dans ses Morales : "La science à son jour prépare un vrai festin ; alors, dans l'estomac de l'esprit, c'en est fait du jeûne de l'ignorance". Mais l'ignorance ne disparaît totalement que grâce à l'une et à l'autre science, c'est-à-dire et la spéculative et la pratique. Donc, si elle est le don, la science est et spéculative et pratique.


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Message  ROBERT. Jeu 23 Déc 2010, 6:58 pm

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LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 3. Le don de science est-il science pratique ? (suite)

CONCLUSION : Comme nous l'avons dit plus haut, le don de science est fait, ainsi que celui d'intelligence, pour la certitude de la foi. [40] Or la foi consiste premièrement et principalement dans une spéculation, et cela en tant qu'elle adhère à la vérité première. Mais, parce que la vérité première est aussi la fin toute dernière pour laquelle nous agissons, de là vient que la foi s'étend aussi à l'action, selon le mot de l'Apôtre : "La foi par la dilection devient action". Dès lors il faut aussi que le don de science se tourne premièrement et principalement vers la spéculation : en ce sens on sait ce qu'on doit tenir par la foi; mais secondairement le don de science s'étend aussi à l'action, en ce sens que nous sommes dirigés dans ce que nous avons à faire par la science des choses à croire et de ce qui est consécutif aux choses à croire.[41]




notes explicatives :



[40] Qu. 9, art. 3, concl. init. — Cette remarque confirme notre commentaire. Le don de science corrobore et prolonge celui d'intelligence. Tous les deux sont l'épanouissement de la vertu de foi et produisent ensemble ce fruit de foi qui est une spéciale certitude dont nous avons donné plus haut et redonnerons plus bas les caractéristiques.



[41] Qu. 9, art. 3, concl. fin. — Rappelons-nous donc bien que la contemplation est une application de la pensée à ce qui est, et l'action une direction imprimée sur ce qui est à faire. Or, la foi, qui est avant tout une connaissance de contemplation, est aussi par extension une connaissance d'action. Les dons s'adjoignent à elle pour sa fonction essentielle, mais aussi sur toute son extension.

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Message  ROBERT. Mar 28 Déc 2010, 7:26 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 3. Le don de science est-il science pratique ? (suite)


SOLUTIONS : 1. Saint Augustin parle du don de science en tant qu'étendu à l'activité. L'action lui est attribuée en effet, mais pas toute seule ni en premier lieu. C'est aussi de cette manière que le don de science dirige la piété.

2. De là on voit quelle solution donner à la seconde difficulté.

3. A propos du don d'intelligence, on l'a bien dit, quiconque a de l'intelligence n'a pas le don d'intelligence, mais celui qui est intelligent comme par l'habitude de la grâce. De même, à propos du don de science, il faut aussi comprendre que ceux-là seuls le possèdent qui ont par une infusion de la grâce un jugement bien sûr, concernant ce qu'ils ont à croire et ce qu'ils ont à faire, ce jugement qui ne dévie en rien de la droiture de la justice. C'est là la science des saints dont il est dit dans la Sagesse : "Le Seigneur a mené le juste par des voies droites et lui a donné la science des saints".


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Message  ROBERT. Jeu 30 Déc 2010, 9:16 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.

ARTICLE 4. La troisième béatitude : Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés, répond-elle au don de science ?


DIFFICULTES : 1. Il ne semble pas. Car si le mal est la cause de la tristesse et des larmes, le bien est pareillement la cause de l'allégresse. Mais dans les révélations de la science le bien a beaucoup plus d'importance que le mal ; c'est par le bien que le mal est connu, il est dit en effet au premier livre de l'Ame : "Ce qui est droit est juge de soi-même et de ce qui est oblique". La susdite béatitude ne répond donc pas comme il faut au don de science.

2. Du reste, la considération de la vérité est l'acte même de la science. Mais dans la considération de la vérité il n'y a pas de tristesse, il y a plutôt de la joie. Il est écrit en effet dans la Sagesse : "Il n'y a nulle amertume dans sa société, nul ennui à vivre avec elle, mais de l'allégresse et de la joie". La susdite béatitude ne répond donc pas comme il faut au don de science.

3. Enfin, le don de science consiste dans la spéculation avant de consister dans l'action. Mais, tant qu'il est dans la spéculation, il n'y a pas pour lui d'affliction, parce que l'intelligence spéculative, comme le fait remarquer le troisième livre de l'Ame, "ne dit rien de ce qu'il faut imiter ni de ce qu'il faut éviter", rien qui soit joyeux ni triste. Il ne convient donc pas de supposer que la susdite béatitude réponde au don de science.


CEPENDANT, saint Augustin l'affirme : "La science se rencontre chez ceux qui sont dans les larmes lorsqu'ils se sont rendu compte qu'ils sont enchaînés aux maux mêmes qu'ils ont recherchés comme des biens".


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Message  ROBERT. Lun 03 Jan 2011, 8:18 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:

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LA FOI

QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.


ARTICLE 4. La troisième béatitude : Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés, répond-elle au don de science ? (suite)


CONCLUSION : Le propre de la science c'est de juger comme il faut des créatures. Or il y a des créatures qui sont pour l'homme une occasion de se détourner de Dieu, selon la parole de la Sagesse : "Les créatures sont devenues une abomination, une souricière aux pieds des insensés". Ces insensés sont ceux qui n'ont pas sur ces créatures un jugement droit, tant qu'ils estiment qu'il y a en elles le bien parfait, ce qui les conduit à mettre leur fin en elles et par là à pécher et à perdre le vrai bien. Ce dommage-là est précisément révélé à l'homme dans cette juste évaluation des créatures qu'on a par le don de science. C'est pourquoi on dit que la béatitude des larmes répond au don de science. [42]


note explicative :


[42] Qu. 9, art. 4, concl. — Le propre de la science des saints c'est de bien juger le créé. C'est pourquoi sa béatitude est celle des pleurs. En cette béatitude comme dans les autres il y a un mérite et une récompense. Le mérite en celle-ci est de savoir justement se détacher des créatures en raison de tout ce qu'elles peuvent avoir d'hostile à Dieu soit dans l'appréciation soit dans l'usage. Ce détachement ne se fait pas sans douleur. La douleur peut aller jusqu'aux larmes. Une sainte âme saura faire son deuil des personnes et des choses. Le Saint-Esprit l'y pousse et produit en elle une sorte de désenchantement salutaire qui contient tout le mérite d'une béatitude. La récompense se fait sentir immédiatement, et c'est de savoir ne plus considérer les créatures que dans la vue de Dieu et ne plus user d'elles que pour aller vers Lui. Cela donne aux saintes âmes une bienheureuse maturité et leur procure cette consolation de regarder les personnes et les choses comme on fera dans l'éternité.



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Message  ROBERT. Lun 03 Jan 2011, 8:28 pm

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IIa-IIæ, qu. 9, par R. Bernard, O.P., Éd. Des Jeunes, Paris, 1950, et notes explicatives a écrit:


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QUESTION 9.

LE DON DE SCIENCE.


ARTICLE 4. La troisième béatitude : Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés, répond-elle au don de science ? (suite)


SOLUTIONS : 1. Les biens créés n'excitent la joie spirituelle que dans la mesure où ils sont rapportés au bien divin duquel proprement s'élève la joie spirituelle. C'est pourquoi la paix spirituelle, avec la joie qui en est la conséquence, répond directement au don de sagesse. Mais, ce qui répond au don de science, c'est à coup sûr, en premier lieu, l'affliction par rapport aux errements passés; puis, par voie de conséquence, la consolation que l'on a lorsque par le bon jugement de science on oriente les créatures vers le bien divin.

Voilà pourquoi dans cette béatitude on met comme mérite les larmes et comme récompense la consolation qui en est la suite. Consolation qui est bien commencée dans cette vie, mais consommée dans la vie future. [43]

2. La considération même de la vérité est pour l'homme un sujet de joie. Mais la réalité dont on considère la vérité peut être quelquefois un sujet de tristesse. C'est par là que les larmes sont attribuées à la science.

3. A la science tant qu'elle reste dans la spéculation ne répond aucune béatitude, parce que [size][size=18]la béatitude de l'homme ne consiste pas dans la considération des créatures mais dans la contemplation de Dieu
. Mais la béatitude de l'homme consiste en quelque manière dans le bon usage des créatures et dans une affection bien ordonnée à leur égard, et je veux dire par là une béatitude à la mesure du voyage de la vie.

Et voilà la raison pour laquelle il n'y a pas de béatitudes se rattachant à la contemplation qui soient attribuées à la science; mais il y a des béatitudes de cet ordre qui sont attribuées à l'intelligence et à la sagesse parce qu'elles sont l'une et l'autre tournées vers le divin. [44]




notes explicatives :


[43] Qu. 9, art. 4, sol. 1. — Le don de science se ressent dans ses effets des limites de son objet. La joie parfaite ne peut se trouver que dans un vif amour de Dieu, et il n'y a de paix absolue que dans le repos de l'âme en cet amour. C'est pourquoi la joie et la paix, qui sont les fruits les plus délicieux de la vie spirituelle telle qu'elle est commencée en ce monde et consommée dans l'autre, sont cueillies sur la charité.

Ils mûrissent dans les cœurs lorsque ceux-ci ont la sagesse de ne goûter vraiment que Dieu et de ne rien aimer dans les créatures que ce qui y est de Dieu (cf. note 26). Le don de science ne peut prétendre à des effets aussi élevés, et même le bon usage des créatures en vue de Dieu n'est pas capable à lui seul de produire la pleine joie de l'âme. La science est principalement le don du droit chemin. Ce don imprime en nous le sens de la route, l'instinct de la bonne orientation. Il aide à faire bon voyage. Il apporte la béatitude du voyage. "Par la science, dit notre auteur, l'Esprit nous enseigne à nous bien comporter au milieu d'une nation mauvaise et pervertie. (III Sent., dist. 34, qu. 1, art. 2, concl.)". Le don de science ne produit donc pas de fruit à proprement parler. Etant appliqué formellement aux créatures, il nous apprend à en bien juger et à en bien user. Il nous interdit par conséquent de nous y arrêter ni d'en jouir, il nous empêche de les diviniser, de les idolâtrer, de les rechercher comme une fin. "J'adore la vie", disent les gens. Oui, disent les saints, si c'est la vraie vie, celle qu'on ne goûte qu'en Dieu. Et ce goût de Dieu est sagesse plus que science.



[44] Qu. 9, art. 4, sol. 3. — Le don de science, avons-nous dit, a deux fonctions, l'une de contemplation, l'autre de direction et d'action.

— 1º Par la première, il ne peut procurer une vraie béatitude. Il aide à mieux connaître les créatures et fait qu'on les juge à leur juste valeur. Or, connaître mieux les créatures, c'est en mieux voir la dépendance et le néant. Voilà pourquoi saint Thomas, en grand contemplatif qu'il est, conclut si résolument qu'il ne peut y avoir de béatitude dans la contemplation des créatures. Contempler une créature jusqu'à la béatitude, ce serait s'extasier devant cette créature, ce serait être béat d'admiration et d'affection à son égard, ce serait la prendre pour fin dernière et s'en faire un dieu : auquel cas on ferait tout à fait fausse route.

Le don de science est tout justement accordé pour détourner d'une pareille aberration et pour déplorer de tels errements. Comme don spéculatif, il a pour but de détruire les mirages et d'empêcher qu'aucun d'eux nous éblouisse l'esprit. Il nous fait avancer sans encombre non pas dans une contemplation, mais dans la considération des créatures (c'est le mot du texte). Celle-ci, en effet, ne doit jamais être à proprement parler une contemplation, mais doit seulement nous mener à la contemplation de Dieu. Si on entend la contemplation au sens fort et béatifiant, il n'y a de contemplation que de Dieu, et c'est l'œuvre de la sagesse.


— 2º En revanche, la science des saints, comme don actif et pratique, procure à sa manière, par sa fonction de direction, une assez douce béatitude. On se sent dans le bon chemin, on se rend compte pourquoi, on prend la mesure de tout, on s'attache modérément et suivant l'ordre : tout cela est évidemment très heureux, et rend heureux. Les saints sont contents de leur sort et contents de bien des choses. Pour eux tout est grâce : tout concourt au bien des élus. C'est là une béatitude inestimable : elle est assurément pour la route, comme dit le texte, mais elle permet de cheminer allègrement vers la patrie.
On est prêt à quitter ce qui ne peut passer dans l'éternité; on ne veut garder que ce qui peut demeurer dans l'éternité. Il n'empêche pourtant qu'on ne saurait attribuer au don de science d'aussi belles béatitudes qu'à ceux de sagesse et d'intelligence.


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Somme Théologique IIa-IIæ

Tables des Matières pour les Questions 10, 11, 12, 13, et 14..
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Message  ROBERT. Jeu 06 Jan 2011, 4:51 pm

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Somme Théologique IIa-IIæ

Tables des Matières pour les Questions 10, 11, 12, 13, et 14..
:



PROCHAINE QUESTION: IIa-IIæ La Foi, question 15 : Aveuglement de l’esprit et hébétude du sens.







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