L'ÂME de JEANNE D'ARC
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Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
IILe Cœur de la Guerrière
Rarement le monde a vu une campagne militaire aussi brillante que celle dont les bords de la Loire furent le théâtre au printemps de 1429.
Ce qui étonne tout d'abord, dans cette série d'exploits, c'est la pauvreté ou plutôt la nullité des ressources dont Jeanne dispose. Elle n'a rien où s'appuyer. Autour d'elle, le néant ; néant des finances qui ont été gaspillées ; néant des soldats qui ont perdu toute confiance. Mais Jeanne est une créatrice; elle parle à ce néant, et son verbe en fait éclore l'espérance et jaillir la victoire.
Ce qui étonne ensuite dans cette campagne, c'est la rapidité fulgurante de l'action. Jeanne fond sur les Anglais avec une impétuosité qui ne leur laisse pas le temps de se reconnaître. De Poitiers à Blois, de Blois a Orléans qu'elle délivre, d'Orléans à Jargeau, a Beaugency et a Meung, de Meung à Patay, où elle fait prisonnier le fameux Talbot et lui lue ou lui prend cinq mille hommes, de Patay à Troyes qui lui ouvre ses portes, de Troyes a la basilique de Reims, apogée de sa mission, sa course effrayante a les allures de la foudre et dessine sur la carte des éclairs de victoire.
Ce qui étonne encore, dans ce raid militaire, c'est la splendeur des points culminants. Je n'en veux rappeler qu'un seul : la délivrance de cette ville.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
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Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
La France entière avait les yeux fixés sur elle. Comme vous l'avez très bien dit, Monseigneur, il ne restait plus à la grande nation qu'Orléans et Dieu. Vos pères, Messieurs, y donnaient l'exemple de l'héroïsme au milieu des horreurs d'un siège de sept mois. Mais ils étaient à bout de forces et de ressources. Dunois lui-même, le brave Dunois, avait offert de se rendre aux Bourguignons. C'en était fait de la France !
C'est donc vers Orléans que Jeanne se dirige avec une armée qui chante le Veni Creator et des cantiques. Les armées qui chantent des cantiques sont aussi celles qui chantent les Te Deum. La ville l'attendait avec impatience. Jeanne y entre le 29 avril. Elle va droit à la cathédrale. L'enthousiasme, excité par sa vue, est si grand, qu'elle a peine à se frayer un passage. La foule se prosterne devant elle, embrasse ses mains et ses genoux et baise la trace de ses pas. La prière de la cité est entrée avec Jeanne dans celte enceinte où nous sommes : c'est la victoire qui en sort.
En effet, les Anglais sont frappés de stupeur et d'effroi. Le 3 mai, ils n'osent empêcher la Pucelle d'aller avec La Hire au-devant des renforts qu'amène Xaintrailles et de réintégrer la cité avec eux. Le 4, elle prend le fort de Saint-Loup. Le 6, elle brûle Saint-Jean-le-Blanc et les Augustins.
Mais il reste aux ennemis les Tourelles, la hautaine forteresse qui commande la rive gauche de la Loire et d'où Glasdale abime Orléans. Le 7 Jeanne en commence l'attaque; elle applique elle-même des échelles contre les murs; elle accomplit des prodiges de valeur. Elle pousse ses hommes en avant. Elle combat avec sa bannière, plus redoutable que son épée, qui restera vierge; du sang ennemi. Elle est blessée, mais elle n'en tien pas compte et, comme si le ciel avait attendu que son sang très pur eut coulé pour la France , a partir de ce moment, la bataille change de face. La bannière s'approche peu à peu des remparts... Courage! La voix de l'héroïne domine le fracas de la mêlée.
La voix de l'héroïne domine le fracas de la mêlée. Encore un effort et, portée sur la houle sanglante, la queue de la hampe finit par loucher la muraille. « Tout est vôtre ! » clame la jeune fille. Hourrah !
C'est la victoire ! La forteresse, est prise. L'Anglais se précipite au dehors et se noie dans la Loire. Hourrah ! Orléans est délivrée, et la France victorieuse.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
Minute sublime ! Minute de gloire qui décide du sort d'une nation. Qui dira l'ivresse de ceux qui font vécue, et ce qui se passa dans le cœur de la Pucelle et de vos pères quand les combattants rentrèrent dans la ville ! C'était le soir, le plus beau soir qu'ait vu Orléans. Tandis que les trompettes guerrières jettent au loin leurs stridents éclats, et que les cloches sonnent en allégresse, vos pères allument des torches qui illuminent cette nuit triomphale. Ils se précipitent dans les églises, pour remercier Dieu de leur délivrance.
Ils sont venus ici, Messieurs, ils ont prié et pleuré de joie sur ces dalles. Jeanne était avec eux reportant à Jésus-Christ tout l'honneur du succès et inclinant devant Lui sa bannière. Elle ne se doutait pas, l'humble enfant, que la postérité ferait un écho infini à sa prière en joignant le nom de la libératrice au nom du Dieu libérateur. Elle ne se doutait pas que, jusque dans l'avenir le plus lointain, chaque année, à pareille date, à pareille heure, le premier magistrat de la cité remettrait sa bannière au successeur de saint Aignan et qu'à cet instant solennel, les cloches, les trompettes et les cœurs lui chanteraient à l'unisson : Fecisti viriliter et confortatum est cortuum. « Virile a été ton action et magnanime ton cœur, c'est pourquoi tu seras bénie dans tous les siècles».
Hier soir, au moment où s'accomplissait ce rite patriotique et religieux, lorsque je vis s'embraser votre cathédrale depuis son parvis jusqu'à ses tours de dentelle, lorsque j'entendis les voix exultantes du bronze épandues dans la nuit, je croyais voir la douce et fière Pucelle sur son cheval de bataille, fendant, comme autrefois, les Ilots de son cher peuple Orléanais et vous criant, avec cet accent qui lit tomber les Tourelles et qui finira bien par faire tomber toutes les bastilles de nos divisions : « O Français, soyez unis dans l'amour du Christ el de la France, Une France unie et croyante sérail invincible. Vive le Christ qui aime les Francs ! Et vive la France qui aime le Christ ! »
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
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Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
Ce qui étonne, en quatrième lieu, dans cette courte guerre, c'est la grandeur de ses conséquences. La bataille d'Orléans fut une bataille mondiale. Elle a été classée, par les philosophes de l'Histoire, parmi les quinze batailles qui ont changé la face du monde. Par elle, en effet, Jeanne a rompu le charme des victoires anglaises et condamné l'envahisseur à une inévitable défaite; elle a relevé la France pour des siècles; elle l'a mise à l'abri du protestantisme où la Grande-Bretagne l'eut entraînée cent ans plus tard ; elle a ainsi conservé au catholicisme la prééminence religieuse qui allait lui échapper. En vérité, on peut se demander si jamais campagne aussi brève eut des répercussions aussi lointaines et aussi grandioses.
Ce qui étonne enfin dans celte aventure inouïe, c'est l'évidence de l'intervention surnaturelle. On dit parfois que Jeanne dut ses succès à une brillante hallucination de son cerveau, à une généreuse exaltation de son cœur. Eh, Messieurs, nous savons bien ce que peut l'hallucination et aussi ce qu'elle ne peut pas. Elle peut, pendant quelque temps, surexciter l'activité et l'audace humaines ; mais, ce qu'elle fait gagner en ardeur fébrile, elle le fait perdre en réflexion et en perspicacité : et puis, l'ardeur fébrile tombe et fait place à rabattement. Par suite, elle ne produit rien de grand et de durable : elle est essentiellement stérile. Or, l'action de Jeanne est exceptionnellement féconde. Elle ne provient donc pas de l'hallucination, mais du secours d'en haut.
Un médecin incrédule disait un jour à un de ses amis : « Venez a la Salpêtrière : je vous montrerai cinquante Jeanne d'Arc ». — « C'est trop, répondit l'ami, montrez-m'en une seule qui nous puisse rendre l'Alsace et la Lorraine et je renonce à voir le surnaturel dans la Libératrice d'Orléans ».
Seule, une assistance divine toute spéciale peut expliquer cette prodigieuse enfant, mais une assistance tombant sur un grand cœur. Ce cœur a été le foyer d'où l'héroïsme a jailli sur les actions extérieures. Pénétrons de nouveau dans ce cœur viril.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
Date d'inscription : 26/01/2009
Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
Ce que j'y admire tout d'abord c'est l'héroïsme de son amour pour Dieu. Cet amour se traduit par une profonde horreur du péché. « J'aimerais mieux mourir, s'écrie-t-elle, que de rien faire que je susse être péché ou contre la volonté de Dieu ». Le péché qu'elle déteste tant pour elle-même, elle le combat chez les autres. L'Esprit-Saint a dit :
« La justice élève les nations; le péché les rend malheureuses », Jeanne nous a donné une admirable variante de cet oracle, quand elle a dit :
C'est le péché qui fait perdre les batailles ».
Parole originale, Messieurs, et qui paraîtra naïve à la sagesse humaine, mais, en vérité, parole profonde, parole immortelle, que je voudrais voir inscrite sur la garde de toutes nos épées, sur l'âme de tous nos canons, sur la soie de tous nos drapeaux et surtout, oh ! surtout, dans le cœur de tous nos soldats :
ils seraient invincibles.
Ce que j'admire encore dans la Pucelle, c'est sa pureté virginale. Les gaillards qui devaient raccompagner de Vaucouleurs à Chinon trouvaient plaisante son aventure et se promettaient de s'égayer à ses dépens. Mais, à peine en marche, il comprennent qu'ils voyagent avec un ange qu'il faut, bon gré malgré , respecter. Bientôt ils conçoivent pour elle une religieuse vénération. Les vieux hommes d'armes, habitués à la licence des camps, avouent qu'en sa présence ils n'ont jamais osé risquer un propos malsonnant.
Elle ne soutire pas qu'une femme légère pénètre dans son camp et, un jour, elle en chasse plusieurs à coups de plat d'épée.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
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Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
Pendant sa captivité, elle se condamnera à garder ses habits de soldat pour mieux se faire respecter des misérables préposés à sa garde et elle s'assurera ainsi sur leur insolence une victoire encore plus chère à son cœur que celles d'Orléans et de Patay.
Aussi, au témoignage d'un de ses ennemis les plus cruels, l'odieux d'Estivet, qui lui en fera un jour le reproche, on disait par tout l'Occident que jamais l'on avait vu une femme aussi pure et aussi sainte depuis la Vierge Marie.
Ainsi, souvent, Messieurs, la fécondité des œuvres dépend de la virginité d'un grand cœur. Une Vierge a sauvé le genre humain. Une autre vierge a sauvé la France. Ces âmes qui semblent n'aimer que Dieu s'ouvrent à d'incommensurables amours : et Dieu les couronne parfois d'une maternité qui s'étend à un peuple ou à un monde. O Pucelle très sainte, lis éclos dans l'air des batailles, ange dans l'armure d'un preux, ne permets pas que la boue qui monte, monte jamais
jusqu'au cœur de la France.
Une autre beauté qui brille dans le cœur de Jeanne, c'est sa foi héroïque dans sa mission. Elle a longtemps hésité, réfléchie et prié avant de suivre ses voix, mais à partir du jour où elle a reconnue le divin caractère, elle a en elles une indéfectible confiance. Elle est de la bataille de Palay. sure du succès, elle le prédit d'ordinaire à date fixe et dans les moindres détails, et toujours l'événement lui donne raison. Aux plus vieux capitaines, aux connétables, aux princes du sang, comme aux plus humbles soldats, elle parle en souveraine doublée d'une prophétesse. « Avez-vous des éperons? leur dit-elle le matin de la bataille de Patay.
— Eh quoi ! Jeanne , est-ce que nous fuirons
devant les Anglais?
— Non, ce seront eux qui fuiront, mais si vite,
si vite, si vite, qu'il nous faudra de bons éperons
pour les suivre.
— Les aurons-nous du moins ?
— Oui, nous les atteindrons, fussent-ils pendus
aux nuages.
— Les chasserons-nous de France ?
— Oui, tous, tous excepté les morts! »
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
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Re: L'ÂME de JEANNE D'ARC
L'héroïsme du courage va de pair, chez notre Libératrice, avec celui de la foi. Son endurance n'est ni de son âge, ni de son sexe. Nul de ses soldats ne supporte aussi gaiement qu'elle les fatigues de la marche, la privation de nourriture de sommeil. Elle couche comme eux sur la dure, à la paillade, suivant le mot du duc d'Alençon.
Parfois, elle ne prend que le soir un peu de pain et de vin trempe d'eau. Elle passe dix-huit heures consécutives a cheval. Elle reste huit jours et huit nuits renfermée dans sa lourde armure. Avec quelle bravoure elle s'expose au danger! Elle s'élance sur les chevaux les plus fringants a travers la bataille. Les boulets et les flèches pleuvent autour d'elle : elle ne pense qu'à rallier et à entraîner ses troupes. D'un regard d'aigle, elle embrasse toutes les opérations et profite de foules les fautes de l'ennemi.
Ne croyez pas, cependant, qu'elle soit insensible à la souffrance. Elle n'a rien de la morgue du stoïcien, ni de la fureur de l'amazone antique.
Elle est très délicate, mais d'une vaillance surhumaine. Blessée à l'assaut des Tourelles d'un trait d'arbalète qui lui traverse l'épaule, elle pleure. Oui, Jeanne a pleuré. Le Christ aussi. Mais, comme le Christ, si elle ressent la douleur, elle sait la dominer.
D'une main ferme, elle arrache la flèche. Elle se met quelques instants à genoux, puis elle remonte à cheval. Que dites-vous, Messieurs, de ce courage? N'est-il pas viril et magnanime le cœur qui en fut l'inspirateur ? Non moins admirable est sa bonté. Elle veut bien souffrir, mais elle ne veut pas que l'on souffre ou que l'on pleure autour d'elle.
Elle ne veut pas vous voir souffrir, artisans des villes, paysans des campagnes. Elle vous aime. Elle est votre sœur, elle est du peuple, comme vous ; elle appartient à cette grande famille des travailleurs, qui, depuis des siècles, féconde nos sillons de ses sueurs et où l'on admire si souvent, dans la chaumière ou dans l'atelier, une vertu patriarcale, noblesse du cœur qui vaut celle du sang.
C'est pour vous délivrer des horreurs de la guerre qu'elle a pris les armes. Et quand, sauvés par elle, vous venez la remercier et la bénir, quand vous vous pressez sur son passage, cherchant à baiser ses mains victorieuses, elle vous les abandonne : elle ne veut pas que l'on vous éloigne, elle vous sourit, elle vous parle, elle est naïvement heureuse de votre bonheur.
A suivre...
Monique- Nombre de messages : 13792
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