LA CROIX dans LA TEMPÊTE

D'abord il faut séparer les fidèles de la Hiérarchie catholique
(Pape, évêques et prêtres); et pour cela il faut calomnier
ceux-ci, les montrer comme des ennemis de la Patrie, des
chiens courants de l'impérialisme, des espions, des assassins,
etc...

"La religion, disait Lénine, est un obstacle à la culture
marxiste. Le marxisme, c'est le matérialisme; pour cette raison,
il doit s'opposer sans merci à la religion.”

Vous avez vu, chers lecteurs, dans les pages qui précèdent,
que les communistes chinois s'efforcent de réaliser pleinement  
le programme marxiste: détruire l'unité de l'Eglise en Chine pour
pouvoir plus aisément détruire la religion elle-même.

La Merveilleuse Découverte

Dans la tourmente communiste qui s'est abattue sur la
Chine, nombreux sont les chrétiens, adultes et enfants,
qui se conduisent en héros. Leurs réponses et leur
conduite sont dignes de figurer dans les Actes des Martyrs.

Un père de famille nombreuse, huit enfants de 1 à 16 ans,
chargé en outre du soin de ses vieux parents, n'hésitait pas
à répondre aux policiers qui le poussaient à prendre la tête
des chrétiens dissidents : "J'irai en prison, si c'est nécessaire ;
mais je resterai fidèle aux prêtres, à l'Evêque et au Pape...
Je suis prêt à donner mon sang pour ma Patrie ; mais prêt
aussi à le donner pour ma Religion.” — ”Si tu refuses, lui
répondirent les policiers, on t'emprisonnera et ta famille sera
sans soutien.” Des larmes coulèrent des yeux de ce pauvre
père qui murmura : "Oui, les miens souffriront, mourront
peut-être de privations, mais Dieu nous donnera à tous la
force de lui être fidèles.”

Un autre père de famille, chaque soir après la prière en
commun, fait défiler ses enfants devant lui et leur fait
promettre d'être toujours fidèles à l'Eglise et au Pape.
Après quoi, il les bénit en traçant sur leur front le signe de
la croix. Nos chrétiens chinois ont eu des émules dans le
passé.

Autrefois, il y a plusieurs siècles, une terrible persécution
voulut anéantir l'Eglise Catholique au Japon. Nombreux furent
les martyrs. Cependant, sous les cendres de cet immense
incendie, pareil à un tison, la Foi divine se conserva. La
découverte des anciens chrétiens du Japon réjouit le cœur de
tous les catholiques et doit être pour nous un motif d'espérer.

Une ville flottante

Voici comment Adrien Launay, l'historien des Missions-
Etrangères, relate cette merveilleuse découverte :

" Elle eut lieu à Nagasaki où une chapelle avait été élevée
"le 19 février 1865. Ce fut à M. Petitjean que la Providence
"réserva l'incomparable honneur et l'ineffable joie d'être
" l'instrument de cette découverte.
" Il a raconté dans des pages émouvantes comment il fut
"mis sur les traces d tait écoulé depuis la bénédiction de
"l'église de Nagasaki. Le 17 mars 1865, vers midi et demi,
" une quinzaine de personnes se tenaient à la porte de l'église.
" Poussé sans doute par mon bon ange, je me rends auprès
'' d'elles et leur ouvre la porte ; J'avais à peine eu le temps
"de réciter un Pater, que trois femmes de cinquante à soixante
'' ans s’agenouillent près de moi et me disent, la main sur la
'' poitrine et à voix basse:

Notre cœur à tous qui sommes ici ne diffère pas du vôtre.
— Vraiment! mais d'où êtes-vous donc?”
Elles me nomment leur village et ajoutent :
Chez nous, presque tout le monde nous ressemble. »
" Soyez béni, ô mon Dieu! pour tout le bonheur dont mon
" âme fut alors inondée. Quelle compensation des cinq années
" d’un ministère stérile ! A peine nos chers Japonais se sont-ils
" ouverts à moi, qu’ils se laissent aller à une confiance qui
" contraste étrangement avec les allures de leurs frères païens.
" II faut répondre à toutes leurs questions, leur parler de
" O Deous sama, O Yeso sama, santa Maria sama ", noms par
lesquels ils désignent Dieu, Notre-Seigneur Jésus-Christ, la
Sainte Vierge.

"La vue de la statue de Notre-Dame avec l’enfant Jésus leur
"rappelle la fête de Noël, qu’ils ont célébré au onzième mois,
"m'ont-ils dit. Ils me demandent si nous ne sommes pas au dix-
" septième jour du temps de tristesse (carême). Saint Joseph ne
" leur est pas non plus inconnu ; ils l'appellent : le père adoptif
'' de Notre-Seigneur : ”0 Yaso samano yo fou”. Au milieu des
'' questions qui se croisent, un bruit de pas se fait entendre ;
'' tous aussitôt de se disperser. Mais dès que les nouveaux
'' arrivants sont reconnus, tous accourent en riant de leur frayeur.

— Ce sont des gens de notre village, ils ont le même
'' cœur que nous.
'' Il fallut pourtant se séparer, afin de ne pas éveiller
'' les soupçons des officiers dont je redoutais la visite.
'' Le jeudi et le vendredi saints, 13 et 15 avril, quinze
'' cents personnes visitent l’église de Nagasaki ; le
'' presbytère est envahi ; les fidèles en profitent pour
'' satisfaire en secret leur dévotion devant les crucifix
'' et les statues de la Sainte Vierge. Les premiers jours
'' de mai, les missionnaires apprennent l’existence de
'' deux mille cinq cents chrétiens, disséminés dans le
'' voisinage de la ville.

'' Le 15 mai, arrivent les députés d’une île peu éloignée
'' d’ici. Après un court entretien, nous les congédions,
'' ne gardant auprès de nous que le catéchiste et le chef
'' de la pieuse caravane. Le catéchiste, nommé Pierre,
'' nous donne les plus précieux renseignements. Disons
'' d’abord que sa formule de baptême ne diffère pas de la
'' nôtre et qu’il la prononce très distinctement. Il reste
'' encore, affirme-t-il, beaucoup de chrétiens dans tout le
'' Japon, un peu partout. Il me cite, en particulier, un point
'' où sont groupées plus de mille familles chrétiennes. Il
'' nous interroge ensuite sur le grand chef du royaume de
'' Rome dont il désire savoir le nom.

'' Lorsque nous lui disons que l’auguste vicaire de Jésus-
'' Christ, le Saint Pontife Pie IX, sera bien heureux d'apprendre
'' les consolantes nouvelles que lui et ses compatriotes
'' chrétiens viennent de nous donner, Pierre laisse éclater toute
'' sa joie. Et néanmoins, avant de nous quitter, il veut s’assurer
'' encore si nous sommes bien les successeurs des anciens
'' missionnaires.
'' N ’avez-vous point d’enfants? nous demande-t-il d’un air
''timide.
'' — Vous et tous vos frères chrétiens et païens du Japon,
'' voilà les enfants que le bon Dieu nous a donnés. Pour d’autres
'' enfants, nous ne pouvons pas en avoir ; le prêtre doit, comme
'' vos premiers apôtres, garder toute sa vie le célibat. »
'' A cette réponse, Pierre et son compagnon inclinent leur
" front jusqu'à terre en s'écriant :
" 0 Ils sont vierges. Merci ! merci ! »

'' Le lendemain, tout un village chrétien demandait la visite
" des missionnaires, et deux jours après, six cents autres
'' catholiques envoyaient à Nagasaki une députation de vingt
'' personnes. Au 8 juin, vingt-cinq chrétientés étaient
'' connues des missionnaires et sept baptiseurs s'étaient mis
'' en relation directe avec eux.

'' Ainsi, en l'absence de tout secours extérieur, sans les
" sacrements, sauf le baptême ; par l'action de Dieu d'abord,
puis grâce à la fidèle transmission dans les familles des
" enseignements et des exemples des chrétiens et des martyrs
" japonais des seizième et dix-septième siècles, le feu sacré de
'' la foi véritable, ou du moins une étincelle encore ardente de
'' ce feu était demeurée dans un pays tyrannisé par le
'' gouvernement le plus despotique et le plus hostile à la
'' religion chrétienne !

Il n’y avait donc qu'à souffler sur cette
'' étincelle et à en ranimer la flamme pour réaliser une fois de
'' plus le vœu exprimé par le Sauveur : Je suis venu apporter le
'' feu sur la terre et que veux-je, sinon qu’il s'allume.
" Un cri de joie sorti de tous les cœurs catholiques salua ce
"grand événement.”

L’Eglise de Chine avant la tempête

La Chine, longtemps connue sous le nom de "Céleste
Empire”, est un immense pays peuplé de 483.800.000
habitants. L’évangélisation de la Chine ne fut réellement
commencée qu’au XIV*”16 siècle. A la mort du premier
Archevêque de Kambalick (Pékin), Jean de Montcorvin,
l’Eglise de Chine disparut complètement. Saint François
Xavier mourut en 1552 dans la petite île de Sancian, au
moment où il se préparait à pénétrer en Chine.

Les Jésuites réussirent à s’établir à Péking et obtinrent
de beaux résultats, entravés par la jalousie des Lettrés et
la querelle des rites chinois.

Ce n’est qu’au XIX ième siècle que reprit sérieusement
l’évangélisation de la Chine, malgré les persécutions et
les bouleversements politiques.

L’Eglise de Chine, comme le grain de sénevé, devint un
arbre florissant. Plus connue, plus aimée, elle travaillait
avec ardeur à gagner au Christ ce grand et noble peuple
chinois. Les chiffres qui suivent en font foi :

Archevêchés 20
Evêchés 84
Préfectures Apostoliques 35
Prêtres étrangers 3.015
Prêtres chinois 2.676
Frères étrangers 475
Frères chinois 632
Religieuses étrangères 2.351
Religieuses chinoises 5.112
Population catholique 3.274.740
Catéchumènes 194.712

AUXILIAIRES LAÏQUES :
Catéchistes 1.927
Catéchistesses 1.332
Maîtres d'écoles 3.912
Maîtresses d'écoles 2.591
Vierges enseignantes 1.761

SEMINARISTES :
Grands séminaristes 924
Petits séminaristes 2.705

ŒUVRES DE MISERICORDE :
Orphelinats : 254
Orphelins (dans les orph.) 15.696
Reçus dans l'année par
Sainte-Enfance 20.740
Hôpitaux et hospices 216
Malades 81.628
Vieillards 4.262

Dispensaires 781
Consultations 11.240.344

ŒUVRES SCOLAIRES
Universités 3
Ecoles secondaires 189
" primaires supérieures 542
” primaires 1.469
” de doctrine 2.243

Il faudrait encore citer :

Les observatoires :
météorologie et sismologie à Zikawei
astronomie et magnétisme à Zocé
Le Musée Heude (Histoire naturelle) à Shanghai
Les écoles de sourds-muets
Les écoles d’infirmières
Les Hospices d’aliénés
Les Hospices pour aveugles
Les Léproseries
Les ateliers, les ouvroirs, etc...

L’Eglise de Chine ne périra pas ; elle sortira plus belle de
l’épreuve ; elle renaîtra de ses cendres... "Si le grain de froment
tombant en terre ne meurt pas, il ne porte pas de fruits ...”

«Si Dieu le veut, — et nous t'en supplions
de toute l'ardeur de notre cœur — il peut
arrêter le fléau (la persécution), il peut faire
que la résurrection suive de près la passion,
que les sacrifices actuels portent beaucoup de
fruits. Cela suppose que les prières de l'Eglise
entière obtiennent cette grâce pour nos fils
souffrants....»

(Sa Sainteté Pie XII)