Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XV: AVANT LE DÉLUGE. (complet)
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XV: AVANT LE DÉLUGE. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XV, cap. XXIV a écrit:
LIVRE QUINZIÈME: AVANT LE DÉLUGE.
CHAPITRE XXIV.
COMMENT IL FAUT ENTENDRE CE QUE DIEU
DIT À CEUX QUI DEVAIENT PÉRIR PAR LE DÉLUGE:
"ILS NE VIVRONT PLUS QUE CENT VINGT ANS".
Quand Dieu dit: "Ils ne vivront plus que cent vingt ans 2", il ne faut pas entendre que les hommes ne devaient pas passer cet âge après le déluge, puisque quelques-uns ont vécu depuis plus de cinq cents ans; mais cela signifie que Dieu ne leur donnait plus que ce temps-là jusqu’au déluge. Noé avait alors quatre cent quatre-vingts ans; ce que l’Ecriture, selon sa coutume, appelle cinq cents ans pour faire le compte rond. Or, le déluge arriva l’an six cent de la vie de Noé 3, en sorte qu’il y avait encore, au moment de la menace divine, cent vingt ans à écouler jusqu’au déluge. On croit avec raison que, lorsqu’il arriva, il n’y avait plus sur la terre que des gens dignes d’être exterminés par ce fléau: car, bien que ce genre de mort n’eût pu nuire en aucune façon aux gens de bien, qui seraient toujours morts sans cela, toutefois il est vraisemblable que le déluge ne fit périr aucun des descendants de Seth.
Voici quelle fut la cause du déluge, au rapport de l’Ecriture sainte: "Comme Dieu, dit-elle, eût vu que les hommes devenaient de jour en jour plus méchants et que toutes leurs pensées étaient sans cesse tournées au mal, il se mit à penser et à réfléchir que c’était lui qui les avait créés, et il dit: J’exterminerai l’homme que j’ai créé, et depuis l’homme jusqu’à la bête, depuis les serpents jusqu’aux oiseaux; car j’ai de la colère de les avoir créés 1".
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2. Genèse VI, 3.— 3. Genèse VII, 11. ― 1. Genèse VI, 5-7.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
Italiques et
gras ajoutés.
à suivre…
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XV: AVANT LE DÉLUGE. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XV, cap. XXV a écrit:
LIVRE QUINZIÈME: AVANT LE DÉLUGE.
CHAPITRE XXV.
LA COLÈRE DE DIEU NE TROUBLE POINT
SON IMMUABLE TRANQUILLITÉ.
La colère de Dieu 2 n’est pas en lui une passion qui le trouble, mais un jugement par lequel il punit le crime, de même que sa pensée et sa réflexion ne sont que la raison immuable qu’il a de changer les choses. Il ne se repent pas, comme l’homme, de ce qu’il a fait, parce que son conseil est aussi ferme que sa prescience certaine; mais si l’Ecriture ne se servait pas de ces expressions familières, elle ne se proportionnerait pas à la capacité de tous les hommes dont elle veut procurer le bien et l’avantage, en étonnant les superbes, en réveillant les paresseux, en exerçant les laborieux, en éclairant les savants. Quant à la mort qu’elle annonce à tous les animaux, et même à ceux de l’air, c’est une image qu’elle donne de la grandeur de cette calamité à venir, et non une menace qu’elle fait aux animaux dépourvus de raison, comme s’ils avaient aussi péché.
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2. Il y a un traité exprès de Lactance: De la colère de Dieu.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XV: AVANT LE DÉLUGE. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XV, cap. XXVI a écrit:
LIVRE QUINZIÈME: AVANT LE DÉLUGE.
CHAPITRE XXVI.
TOUT CE QUI EST DIT DE L’ARCHE DE NOÉ DANS
LA GENÈSE FIGURE JÉSUS-CHRIST ET L’ÉGLISE.
En ce qui regarde le commandement que Dieu fit à Noé, qui était, selon le témoignage de l’Ecriture même, un homme parfait 3, non de cette perfection qui doit un jour égaler aux anges les citoyens de la Cité de Dieu, mais de celle dont ils sont capables en cette vie, en ce qui regarde, dis-je, le commandement que Dieu lui fit de construire une arche pour s’y sauver de la fureur du déluge, avec sa femme, ses enfants, ses brus et les animaux qu’il eut ordre d’y faire entrer, c’est sans doute la figure de la Cité de Dieu étrangère ici-bas, c’est-à-dire de l’Eglise, qui est sauvée par le bois où a été attaché le médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme 4. Les mesures même de sa longueur, de sa hauteur et de sa largeur, sont un symbole du corps humain dont Jésus-Christ s’est vraiment revêtu, comme il avait été prédit.
En effet, la longueur du corps de l’homme, de la tête aux pieds, a six fois autant que sa largeur, d’un côté à l’autre, et dix fois autant que sa hauteur, c’est-à-dire que son épaisseur, prise du dos au ventre. C’est pourquoi l’arche avait trois cents coudées de long, cinquante de large et trente de haut. La porte qu’elle avait sur le côté est la plaie 5 que la lance fit au côté de Jésus-Christ crucifié 1. C’est, en effet, par là qu’entrent ceux qui viennent à lui, parce que c’est de là que sont sortis les sacrements par qui les fidèles sont initiés. Dieu commande qu’on la construise de poutres cubiques, pour figurer la vie stable et égale des saints; car dans quelque sens que vous tourniez un cube, il demeure ferme sur sa base. Les autres choses de même qui sont marquées dans la structure de l’arche sont des figures de ce qui se passe dans l’Eglise.
Il serait trop long d’expliquer tout cela en détail, outre que nous l’avons déjà fait dans nos livres contre Fauste le manichéen, qui prétend qu’il n’y a aucune prophétie de Jésus-Christ dans l’Ancien Testament. Il se peut bien faire qu’entre les explications qu’on en donnera, celles-ci soient meilleures que celles-là, et même que les nôtres; mais il faut au moins qu’elles se rapportent toutes à cette Cité de Dieu qui voyage dans ce monde corrompu comme au milieu d’un déluge, à moins qu’on ne veuille s’écarter du sens de l’Ecriture. Par exemple, j’ai dit, dans mes livres contre Fauste, au sujet de ces paroles: "Vous ferez en bas deux ou trois étages 2", que ces deux étages signifient l’Eglise, cette assemblée de toutes les nations, à cause des deux genres d’hommes qui la composent, les Juifs et les Gentils a, et que trois étages la figurent aussi, parce que toutes les nations sont sorties après le déluge des trois fils de Noé.
Un autre, par ces trois étages, entendra peut-être ces trois vertus principales que recommande l’Apôtre, savoir: la foi, l’espérance et la charité 3. On peut aussi et mieux encore y voir l’image de ces trois abondantes moissons de l’Evangile 4, dont l’une rend trente pour un, l’autre soixante et l’autre cent 5, en sorte que la chasteté conjugale occupe le dernier étage, la continence des veuves le second, et celle des vierges le troisième et le plus haut; et ainsi du reste, qu’on peut expliquer de différentes manières, mais où l’on doit toujours prendre garde de ne s’éloigner en rien de la foi catholique.
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3. Genèse VI, 9. — 4. I Timothée II, 5. ―5. Jean XIX, 34.―1. Au livre XII, ch. 14.―2. Genèse VI, 16.―3. Voyez saint Paul, Romains III, 9.―4. Corinthiens XIII, 13. — 5. Mattieu XIII, 8.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
gras ajoutés.
à suivre…
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ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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Re: Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre XV: AVANT LE DÉLUGE. (complet)
Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XV, cap. XXVII a écrit:
LIVRE QUINZIÈME: AVANT LE DÉLUGE.
CHAPITRE XXVII.
ON NE DOIT PAS PLUS DONNER LES MAINS À CEUX QUI NE VOIENT
QUE DE L’HISTOIRE DANS CE QUE LA GENÈSE DIT DE L’ARCHE DE NOË
ET DU DÉLUGE, ET REJETTENT LES ALLÉGORIES, QU’À CEUX QUI N’Y
VOIENT QUE DES ALLÉGORIES ET REJETTENT L’HISTOIRE.
On aurait tort de croire qu’aucune de ces choses ait été écrite en vain, ou qu’on n’y doive chercher que la vérité historique sans allégories, ou au contraire que ce ne soient que des allégories, ou enfin, quoi qu’on en pense, qu’elles ne contiennent aucune prophétie de l’Eglise. Quel homme de bon sens pourrait prétendre que des livres si religieusement conservés durant tant de milliers d’années aient été écrits à l’aventure, ou qu’il y faille seulement considérer la vérité de l’histoire ? Pour ne parler que d’un point, il n’y avait aucune nécessité de faire entrer dans l’arche deux animaux immondes de chaque espèce, et sept des autres; on y en pouvait faire 1 entrer et des uns et des autres en nombre égal 2, et Dieu, qui commandait de les garder ainsi pour en réparer l’espèce, était apparemment assez puissant pour les refaire de la même façon qu’il les avait faits.
Pour ceux qui soutiennent que ces choses ne sont pas arrivées en effet et que ce ne sont que des figures et des allégories, ce qui les porte à en juger ainsi, c’est surtout qu’ils ne croient pas que ce déluge ait pu être assez grand pour dépasser de quinze coudées la cime des plus hautes montagnes, par cette raison, disent-ils, que les nuées n’arrivent jamais au sommet de l’Olympe 3, et qu’il n’y a point là de cet air épais et grossier où s’engendrent les vents, les pluies et les nuages. Mais ils ne prennent pas garde qu’il y a de la terre, laquelle est le plus matériel de tous les éléments. N’est-ce point peut-être qu’ils prétendent aussi que le sommet de cette montagne n’est pas de terre ? Pourquoi ces peseurs d’éléments veulent-ils donc que la terre ait pu s’élever si haut et que l’eau ne l’ait pas pu de même, eux qui avouent que l’eau est plus légère que la terre ? Ils disent encore que l’arche ne pouvait pas être assez grande pour contenir tant d’animaux.
Mais ils ne songent pas qu’il y avait trois étages, chacun de trois cents coudées de long, de cinquante de large et de trente de haut, ce qui fait en tout neuf cents coudées en longueur, cent cinquante en largeur et quatre-vingt-dix en hauteur. Si nous ajoutons à cela, suivant la remarque ingénieuse d’Origène 1, que Moïse, parfaitement versé, au rapport de l’Ecriture 2, dans toutes les sciences des Égyptiens, qui s’adonnaient fort aux mathématiques, a pu prendre ces coudées pour des coudées de géomètres, qui en valent six des nôtres, qui ne voit combien il pouvait tenir de choses dans un lieu si vaste ? Quant à la prétendue impossibilité de faire une arche si grande, elle ne mérite pas qu’on s’y arrête, attendu que tous les jours on bâtit des villes immenses, et qu’il ne faut pas oublier que Noé fut cent ans à construire son ouvrage. Ajoutez à cela que cette arche n’était faite que de planches droites, qu’il ne fut besoin d’aucun effort pour la mettre en mer, mais qu’elle fut insensiblement soulevée par les eaux du déluge, et enfin que Dieu même la conduisait et l’empêchait de naufrager.
Que répondre encore à ceux qui demandent si des souris et des lézards, ou même encore des sauterelles, des scarabées, des mouches et des puces entrèrent aussi dans l’arche en même nombre que les autres animaux ? Ceux qui proposent cette question doivent savoir d’abord qu’il n’était point nécessaire qu’il y eût dans l’arche, non-seulement aucun des animaux qui peuvent vivre dans l’eau, comme les poissons, mais même aucun de ceux qui vivent sur sa surface, comme une infinité d’oiseaux aquatiques. De plus, l’Ecriture marque expressément que Noé y fit entrer un mâle et une femelle de chaque espèce, pour montrer que c’était pour en réparer la race, et qu’ainsi il n’était point besoin d’y mettre ceux qui naissent sans l’union des sexes ou qui proviennent de la corruption 3; ou que si l’on y en mit, ce fut sans aucun nombre certain, comme ils sont ordinairement dans les maisons; ou enfin, si l’on prétend que, pour figurer avec une exactitude parfaite le plus auguste des mystères, il fallait qu’il y eût un nombre limité de toutes les sortes d’animaux qui ne peuvent vivre naturellement dans l’eau, je réponds que la providence de Dieu pourvut à tout cela sans que les hommes eussent à s’en mêler.
Noé ne prenait pas les animaux pour les mettre dans l’arche, mais ils y venaient d’eux-mêmes. Les paroles de l’Ecriture le font assez entendre: "Ils viendront à vous 1"; c’est-à-dire qu’ils n’y viendront pas par l’entremise des hommes, mais par la volonté de Dieu, qui leur en donnera l’instinct. Il ne faut pas s’imaginer néanmoins que les animaux qui n’ont point de sexe y soient entrés, car l’Ecriture dit en termes formels qu’il devait y entrer un mâle et une femelle de chaque espèce. Il existe en effet certains animaux qui s’engendrent de corruption et qui ne laissent pas ensuite de s’accoupler, comme les mouches; il en est d’autres en qui l’on ne remarque aucune différence de sexe, comme les abeilles. Pour les bêtes qui ont un sexe, mais qui n’engendrent point, comme les mules et les mulets, je ne sais si elles y eurent place, et peut-être n’y eût-il que celles dont elles procèdent, et ainsi des autres animaux hybrides. Si toutefois cela était nécessaire pour le mystère, elles y étaient, puisque dans cette espèce d’animaux il y a aussi mâle et femelle.
Quelques-uns demandent encore quelle sorte de nourriture pouvaient avoir là les animaux que l’on croit ne vivre que de chair, si Noé en fit entrer dans l’arche quelques autres pour les nourrir, outre ceux que Dieu lui avait commandés, ou, ce qui est plus vraisemblable, s’il y avait quelques aliments communs à tous 1; car nous savons que plusieurs animaux qui se nourrissent de chair mangent aussi des fruits et particulièrement des figues et des châtaignes. Quelle merveille donc que Noé, ce sage et saint personnage, ait préparé dans l’arche une nourriture convenable à tous les animaux et qu’au surplus Dieu même avait pu lui indiquer? D’ailleurs, que ne mange-t-on point, quand on a faim? Et puis, Dieu n’était-il pas assez puissant pour leur rendre agréables et salutaires toutes sortes d’aliments, lui qui n’en aurait pas eu besoin pour les faire subsister, si cela n’eût été compris dans l’accomplissement figuré du mystère ?
Au reste, que tant de choses spécifiées dans le plus grand détail soient des figures de l’Eglise, c’est ce qu’on ne saurait nier sans opiniâtreté. Les nations, tant pures qu’impures, ont déjà tellement rempli l’Eglise et sont si bien unies par les liens inviolables de son unité, jusqu’à l’accomplissement final, que ce fait seul, qui est si évident, suffit pour ne nous laisser aucun doute sur les autres choses qui ne sont pas aussi claires; et par conséquent, il faut croire que c’est avec beaucoup de sagesse que ces événements ont été confiés à la tradition et à l’écriture, qu’ils sont arrivés en effet, qu’ils signifient quelque chose, et que ce qu’ils signifient concerne l’Eglise. Mais il est temps de finir ce livre, pour continuer dans le suivant l’histoire des deux cités depuis le déluge.
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1. Genèse VII, 2.―2. Comp. Contr. Faust., lib XII, cap. 38 et 15.―3. Le mont Olympe, en Thessalie, dont la hauteur a été fort exagérée par les poètes et les historiens de l’antiquité. Elle est en réalité de 2,373 mètres.―1. Voyez sa seconde Homélie sur la Genèse. ―2. Actes VII, 22. ―3. On remarquera que saint Augustin se montre ici favorable à la génération spontanée, doctrine généralement suspecte aux docteurs de l’Eglise. ― 1. Genèse VI, 19-20. ―1. Comp. Quaest. In Gen. quaest. 6.
Traduction par M. SAISSET, 1869.
soulignés, italiques
et gras ajoutés.
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FIN DU LIVRE QUINZIÈME: AVANT LE DÉLUGE.
ROBERT.- Nombre de messages : 34713
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