Saint Augustin — Cité de Dieu — Livre IX — DEUX ESPÈCES DE DÉMONS. (COMPLET)

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Message  ROBERT. Mar 05 Jan 2016, 12:26 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XV a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XV.

DE JÉSUS-CHRIST HOMME, MÉDIATEUR

ENTRE DIEU ET LES HOMMES.    




S’il est vrai, au contraire, suivant l’opinion la plus plausible et la plus probable, que tous les hommes soient misérables tant qu’ils sont mortels, on doit chercher un médiateur qui ne soit pas seulement homme, mais qui soit aussi Dieu, afin qu’étant tout ensemble mortel et bienheureux, il conduise les hommes de la misère mortelle à la bienheureuse immortalité. Il ne fallait pas que ce médiateur ne fût pas mortel, ni qu’il restât mortel. Or, il s’est fait mortel en prenant notre chair infirme sans infirmer sa divinité de Verbe, et il n’est pas resté dans sa chair mortelle puisqu’il l’a ressuscitée d’entre les morts; et c’est le fruit même de sa médiation que ceux dont il s’est fait le libérateur ne restent pas éternellement dans la mort de la chair. Ainsi, il fallait que ce médiateur entre Dieu et nous eût une mortalité passagère et une béatitude permanente, afin d’être semblable aux mortels par sa nature passagère et de les transporter au-dessus de la vie mortelle dans la région du permanent. Les bons anges ne peuvent donc tenir le milieu entre les mortels misérables elles bienheureux immortels, étant eux-mêmes immortels et bienheureux; mais les mauvais anges le peuvent, étant misérables comme ceux-là et immortels comme ceux-ci. C’est à ces mauvais anges qu’est opposé le bon médiateur qui, à l’encontre de leur immortalité et de leur misère, a voulu être mortel pour un temps et a pu se maintenir heureux dans l’éternité; et c’est ainsi qu’il a vaincu ces immortels superbes et ces dangereux misérables par l’humilité de sa mort et la douceur bienfaisante de sa béatitude, afin qu’ils ne puissent se servir du prestige orgueilleux de leur immortalité pour entraîner avec eux dans leur misère ceux qu’il a délivrés de leur domination impure en purifiant leurs coeurs par la foi.



Quel médiateur l’homme mortel et misérable, infiniment éloigné des immortels et des bienheureux, choisira-t-il donc pour parvenir à l’immortalité et à la béatitude ? Ce qui peut plaire dans l’immortalité des démons est misérable, et ce qui peut choquer dans la nature mortelle de Jésus-Christ n’existe plus. Là est à redouter une misère éternelle; ici la mort n’est point à craindre, puisqu’elle ne saurait être éternelle, et la béatitude est souverainement aimable, puisqu’elle durera éternellement. L’immortel malheureux ne s’interpose donc que pour nous empêcher d’arriver à l’immortalité bienheureuse, attendu que la misère qui empêche d’y parvenir subsiste toujours en lui; et, au contraire, le mortel bienheureux ne s’est rendu médiateur qu’afin de rendre les morts immortels au sortir de cette vie, comme il l’a montré en sa propre personne par la résurrection, et de faire parvenir les misérables à la félicité que lui-même n’a jamais perdue.Il y a donc un mauvais intermédiaire qui sépare les amis, et un bon intermédiaire qui concilie les ennemis.



Et s’il y a plusieurs intermédiaires qui séparent, c’est que la multitude des bienheureux ne jouit de la béatitude que par son union avec le seul vrai Dieu, tandis que la multitude des mauvais anges, dont le malheur consiste à être privés de cette union, est plutôt un obstacle qu’un moyen: légion sans cesse bourdonnante qui nous détourne de ce bien unique d’où dépend notre bonheur, et pour lequel nous avons besoin, non de plusieurs médiateurs, mais d’un seul, et de celui-là même dont la participation nous rend heureux, c’est-à-dire du Verbe incréé, Créateur de toutes choses. Toutefois il n’est pas médiateur en tant que Verbe; comme tel, il possède une immortalité et une béatitude souveraines qui l’éloignent infiniment des misérables mortels; mais il est médiateur en tant qu’homme, ce qui fait voir qu’il n’est pas nécessaire, pour parvenir à la béatitude, que nous cherchions d’autres médiateurs, le Dieu bienheureux, source de la béatitude, nous ayant lui-même abrégé le chemin qui conduit à sa divinité. En nous délivrant de cette vie mortelle et misérable, il ne nous conduit pas en effet vers ses anges bienheureux et immortels pour nous rendre bienheureux et immortels par la participation de leur essence, mais il nous conduit vers cette Trinité même dont la participation fait le bonheur des anges. Ainsi, quand pour être médiateur il a voulu s’abaisser au-dessous des anges et prendre la nature d’un esclave 1, il est resté au-dessus des anges dans sa nature de Dieu, identique à soi sous sa double forme, voie de la vie sur la terre, vie dans le ciel.




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1. Philippiens, II, 7.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
gras ajoutés.
à suivre…

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Message  ROBERT. Jeu 07 Jan 2016, 11:04 am

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XVI a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.



CHAPITRE XVI.

S’IL EST RAISONNABLE AUX PLATONICIENS DE CONCEVOIR LES DIEUX COMME ÉLOIGNÉS

DE TOUT COMMERCE AVEC LA TERRE ET DE TOUTE COMMUNICATION AVEC LES HOMMES,

DE FAÇON À RENDRE NÉCESSAIRE L’INTERCESSION DES DÉMONS.  





Rien n’est moins vrai que cette maxime attribuée par Apulée à Platon 2 : "Aucun dieu ne communique avec l’homme". Apulée ajoute que la principale marque de la grandeur des dieux, c’est de n’être jamais souillés du contact des hommes 1. Il avoue donc que les démons en sont souillés, et dès lors il est impossible qu’ils rendent purs ceux qui les souillent, de sorte que les démons, par le contact des hommes, et les hommes, par le culte des démons, deviennent également impurs. A moins qu’on ne dise que les démons peuvent entrer en commerce avec les hommes sans en recevoir aucune souillure; mais alors les démons valent mieux que les dieux, puisqu’on dit que les dieux seraient souillés par le commerce des hommes, et que leur premier caractère, c’est d’habiter loin de la terre à une telle hauteur qu’aucun contact humain ne peut les souiller. Apulée affirme encore que le Dieu souverain, Créateur de toutes choses, qui est pour nous le vrai Dieu, est le seul, suivant Platon, dont aucune parole humaine ne puisse donner la plus faible idée; à peine est-il réservé aux sages, quand ils se sont séparés du corps autant que possible par la vigueur de leur esprit, de concevoir Dieu, et cette conception est comme un rapide éclair qui fait passer un rayon de lumière à travers d’épaisses ténèbres.



Or, s’il est vrai que ce Dieu, vraiment supérieur à toutes choses, soit présent à l’âme affranchie des sages d’une façon intelligible et ineffable, même pour un temps, même dans le plus rapide éclair, et si cette présence ne lui est point une souillure, pourquoi placer les dieux à une distance si grande de la terre, sous prétexte de ne point les souiller par le contact de l’homme ?  Et puis, ne suffit-il pas de voir ces corps célestes dont la lumière éclaire la terre autant qu’elle en a besoin ?  Or, si les astres, qu’Apulée prétend être des dieux visibles, ne sont point souillés par notre regard, pourquoi les démons le seraient-ils, quoique vus de plus près ? A moins qu’on n’aille s’imaginer que les dieux seraient souillés, non par le regard des hommes, mais par leur voix, et que c’est pour cela sans doute que les démons habitent la région moyenne, afin que la voix humaine soit transmise aux dieux sans qu’ils en reçoivent aucune souillure.



Parlerai-je des autres sens ? Les dieux, s’ils étaient présents sur la terre, ne seraient pas plus souillés par l’odorat que ne le sont les démons par les vapeurs des corps humains, eux qui respirent sans souillure l’odeur fétide qu’exhalent dans les sacrifices les cadavres des victimes immolées. Quant au goût, comme les dieux n’ont pas besoin de manger pour entretenir leur vie, il n’y a point à craindre que la faim les oblige à demander aux hommes des aliments. Reste le toucher, qui dépend de la volonté. Je sais qu’en parlant du contact des êtres, on a surtout en vue le toucher; mais qu’est-ce qui empêcherait les dieux d’entrer en commerce avec les hommes, de les voir et d’en être vus, de les entendre et d’en être entendus, et tout cela sans les toucher ? Les hommes n’oseraient pas désirer une faveur si particulière, jouissant déjà du plaisir de voir les dieux et de les entendre; et supposé que la curiosité leur donnât cette hardiesse, comment s’y prendraient-ils pour toucher un dieu ou un démon, eux qui ne sauraient toucher un passereau sans l’avoir fait prisonnier ?



Les dieux pourraient donc fort bien communiquer corporellement aux hommes par la voix et par la parole. Car prétendre que ce commerce les souillerait, quoiqu’il ne souille pas les démons, c’est avancer, comme je l’ai dit plus haut, que les dieux peuvent être souillés et que les démons ne sauraient l’être. Que si l’on prétend que les démons en reçoivent une souillure, en quoi dès lors servent-ils aux hommes pour acquérir la félicité après cette vie, leur propre souillure s’opposant à ce qu’ils rendent les hommes purs et capables d’union avec les dieux ? Or, s’ils ne remplissent pas cet objet spécial de leur médiation, elle devient absolument inutile; et je demande alors si leur action sur les hommes ne consisterait pas, non à les faire passer après la mort dans le séjour des dieux, mais à les garder avec eux, couverts des mêmes souillures et condamnés à la même misère. A moins qu’on ne s’avise de dire que les démons, semblables à des éponges, nettoient les hommes de telle façon qu’ils deviennent eux-mêmes d’autant plus sales qu’ils rendent les hommes plus purs.



Mais, s’il en est ainsi, il en résultera que les dieux qui ont évité le commerce des hommes de crainte de souillure, seront infiniment plus souillés par celui des démons. Dira-t-on qu’il dépend peut-être des dieux de purifier les démons souillés par les hommes sans se souiller eux-mêmes, ce qu’ils n’ont pas le pouvoir de faire à l’égard des hommes ? Qui pourrait penser de la sorte, à moins d’être totalement aveuglé par les démons ? Quoi ! Si l’on est souillé, soit pour voir, soit pour être vu, voilà les dieux, d’une part, qui sont nécessairement vus par les hommes, puisque, suivant Apulée, les astres et tous ces corps célestes que le poète appelle les flambeaux éclatants de l’univers 1, sont des dieux visibles; et, d’un autre côté, voilà les démons qui, n’étant vus que si cela leur convient, sont à l’abri de cette souillure ! Ou si l’on n’est pas souillé pour être vu, mais pour voir, que les Platoniciens alors ne nous disent pas que les astres, qu’ils croient être des dieux, voient les hommes quand ils dardent leurs rayons sur la terre. Et cependant ces rayons se répandent sur les objets les plus immondes sans en être souillés: comment donc les dieux le seraient-ils pour communiquer avec les hommes, alors même qu’ils seraient obligés de les toucher pour les secourir ? Les rayons du soleil et de la lune touchent la terre, et leur lumière n’en est pas moins pure.




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2. Ce passage ne prouve-t-il pas que saint Augustin n’avait point sous les yeux les Dialogues, et ne citait guère Platon que sur la foi des Platoniciens latins ?
La maxime ici discutée est textuellement dans le Banquet. Voyez le discours de Diotime, trad. de M. Cousin, t. VI, p. 299.
1. De deo Socratis, p. 44. — 1. Virgile, Géorgiques, livre I, vers 5, 6.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
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Message  ROBERT. Ven 08 Jan 2016, 11:34 am

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XVII a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XVII.


POUR ACQUÉRIR LA VIE BIENHEUREUSE, QUI CONSISTE À PARTICIPER

AU SOUVERAIN BIEN, L’HOMME N’A PAS BESOIN DE MÉDIATEURS

TELS QUE LES DÉMONS, MAIS DU SEUL VRAI MÉDIATEUR, QUI EST LE CHRIST.




J’admire en vérité comment de si savants hommes, qui comptent pour rien les choses corporelles et sensibles au prix des choses incorporelles et intelligibles, nous viennent parler du contact corporel quand il s’agit de la béatitude. Que signifie alors cette parole de Plotin: "Fuyons, fuyons vers notre chère patrie. Là est le Père et tout le reste avec lui. Mais quelle flotte ou quel autre moyen nous y conduira ? Le vrai moyen, c’est de devenir semblable à Dieu 2".Si donc on s’approche d’autant plus de Dieu qu’on lui devient plus semblable, ce n’est qu’en cessant de lui ressembler qu’on s’éloigne de lui. Or, l’âme de l’homme ressemble d’autant moins à cet Etre éternel et immuable qu’elle a plus de goût pour les choses temporelles et passagères.



Et comme il n’y a aucun rapport entre ces objets impurs et la pureté immortelle d’en haut, elle a besoin d’un médiateur, mais non pas d’un médiateur qui tienne aux choses supérieures par un corps immortel et aux choses inférieures par une âme malade, de crainte qu’il ne soit moins porté à nous guérir qu’à nous envier le bienfait de la guérison; il nous faut un médiateur qui, s’unissant à notre nature mortelle, nous prête un secours divin par la justice de son esprit immortel, et s’abaisse jusqu’à nous pour nous purifier et nous délivrer, sans descendre pourtant de ces régions sublimes où le maintient, non une distance locale, mais sa parfaite ressemblance avec son Père. Loin de nous la pensée qu’un tel médiateur ait craint de souiller sa divinité incorruptible en revêtant la nature humaine et en vivant, comme homme, dans la société des hommes. Il nous a en effet donné par son incarnation ces deux grands enseignements, d’abord que la vraie divinité ne peut recevoir de la chair aucune souillure, et puis que les démons, pour n’être point de chair, ne valent pas mieux que nous. Voilà donc, selon les termes de la sainte Ecriture, "ce médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme 1", égal à son Père par la divinité, et devenu par son humanité semblable à nous; mais ce n’est pas ici le lieu de développer ces vérités.




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2. Il est clair que saint Augustin n’a pas le texte de Plotin sous les yeux. Il cite de mémoire et par fragments épars le passage célèbre des Ennéades, I, livre VI, ch. 8 : pheugomen de philen es patrida, aletesteron an tis, k. t. .  (Cf. Ibid.,livre II, ch. 3.) — 1. I Timothée II, 1.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Message  ROBERT. Dim 10 Jan 2016, 4:48 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XVIII a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XVIII.

DE LA FOURBERIE DES DÉMONS, QUI EN NOUS PROMETTANT DE NOUS CONDUIRE

À DIEU NE CHERCHENT QU’À NOUS DÉTOURNER DE LA VOIE DE LA VÉRITÉ.




Quant aux démons, ces faux et fallacieux médiateurs qui, tout en ayant souvent trahi par leurs œuvres leur malice et leur misère, ne s’efforcent pas moins toutefois, grâce à leurs corps aériens et aux lieux qu’ils habitent, d’arrêter les progrès de nos âmes, ils sont si loin de nous ouvrir la voie pour aller à Dieu, qu’ils nous empêchent de nous y maintenir. Ce n’est pas en effet par la voie corporelle, voie d’erreur et de mensonge, où ne marche pas la justice, que nous devons nous élever à Dieu, mais par la voie spirituelle, c’est-à-dire par une ressemblance incorporelle avec lui. Et c’est néanmoins dans cette voie corporelle qui, selon les amis des démons, est occupée par les esprits aériens comme un lieu intermédiaire entre les dieux habitants du ciel et les hommes habitants de la terre, que les Platoniciens voient un avantage précieux pour les dieux, sous prétexte que l’intervalle les met à l’abri de tout contact humain.



Ainsi ils croient plutôt les démons souillés par les hommes que les hommes purifiés par les démons, et ils estiment pareillement que les dieux eux-mêmes n’auraient pu échapper à la souillure sans l’intervalle qui les sépare des hommes. Qui serait assez malheureux pour espérer sa purification dans une voie où l’on dit que les hommes souillent, que les démons sont souillés et que les dieux peuvent l’être, et pour ne pas choisir de préférence la voie où l’on évite les démons corrupteurs et où le Dieu immuable purifie les hommes de toutes leurs souillures pour les faire entrer dans la société incorruptible des anges ?




Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Message  ROBERT. Lun 11 Jan 2016, 10:54 am

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XIX a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XIX.

LE NOM DE DÉMONS NE SE PREND JAMAIS

EN BONNE PART, MÊME CHEZ LEURS ADORATEURS.  




Comme plusieurs de ces démonolâtres, entre autres Labéon, assurent qu’on donne aussi le nom d’anges à ceux qu’ils appellent démons, il est nécessaire, pour ne point paraître disputer sur les mots, que je dise quelque chose des bons anges. Les Platoniciens ne nient point leur existence, mais ils aiment mieux les appeler bons démons. Pour nous, nous voyons bien que l’Ecriture, selon laquelle nous sommes chrétiens, distingue les bons et les mauvais anges, mais elle ne parle jamais des bons démons. En quelque endroit des livres saints que l’on trouve le mot démons, il désigne toujours les esprits malins. Ce sens est tellement passé en usage que, parmi les païens mêmes, qui veulent qu’on adore plusieurs dieux et plusieurs démons, il n’y en a aucun, si lettré et si docte qu’il soit, qui osât dire à son esclave en manière de louange: Tu es un démon, et qui pût douter que ce propos, adressé à qui que ce soit, ne fût pris pour une injure. Mais à quoi bon nous étendre davantage sur le mot démon, alors qu’il n’est presque personne qui ne le prononce en mauvaise part, et que nous pouvons aisément éviter l’équivoque en nous servant du mot ange ?



Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Message  ROBERT. Mer 13 Jan 2016, 6:26 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XX a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XX.

DE LA SCIENCE QUI REND LES DÉMONS SUPERBES.    




Toutefois, si nous consultons les livres saints, l’origine même du mot démon présente une particularité qui mérite d’être connue. Il vient d’un mot grec qui signifie savant 1. Or, l’Apôtre, inspiré du Saint-Esprit, dit: "La science enfle, mais la charité édifie 2"; ce qui signifie que la science ne sert qu’à condition d’être accompagnée par la charité, sans laquelle elle enfle le cœur et le remplit du vent de la vaine gloire. Les démons ont donc la science, mais sans la charité, et c’est ce qui les enfle d’une telle superbe qu’ils ont exigé les honneurs et le culte qu’ils savent n’être dus qu’au vrai Dieu, et l’exigent encore de tous ceux qu’ils peuvent séduire.

Contre cette superbe des démons, sous le joug de laquelle le genre humain était courbé pour sa juste punition, s’élève la puissance victorieuse de l’humilité qui nous montre un Dieu sous la forme d’un esclave; mais c’est ce que ne comprennent pas les hommes dont l’âme est enflée d’une impureté fastueuse, semblables aux démons par la superbe, non par la science.



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1. Daemon ; c’est l’étymologie donnée par Platon dans le Cratyle. Voyez ce dialogue, page 398 B.
— Comp. Mart. Capella, livre II, p. 39.— 2. I Corinthiens VIII, 1.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Message  ROBERT. Ven 15 Jan 2016, 1:07 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XXI a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XXI.

JUSQU’À QUEL POINT LE SEIGNEUR A VOULU DÉCOUVRIR AUX DÉMONS.  





 Quant aux démons, ils le savent si bien, qu’ils disaient au Seigneur revêtu de l’infirmité de la chair: "Qu’y a-t-il entre toi et nous, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre avant le temps ? 3" Il est clair par ces paroles qu’ils avaient la connaissance de ce grand mystère, mais qu’ils n’avaient pas la charité. Assurément ils n’aimaient pas en Jésus la justice et ils craignaient de lui leur châtiment. Or, ils l’ont connu autant qu’il l’a voulu, et il l’a voulu autant qu’il le fallait; mais il s’est fait connaître à eux, non pas tel qu’il est connu des anges qui jouissent de lui comme verbe de Dieu, et participent à son éternité, mais autant qu’il était nécessaire pour les frapper de terreur, c’est-à-dire à titre de libérateur des âmes prédestinées pour son royaume et pour cette gloire véritablement éternelle et éternellement véritable.



Il s’est donc fait connaître, non en tant qu’il est la vie éternelle et la lumière immuable qui éclaire les pieux et purifie les croyants, mais par certains effets temporels de sa puissance et par certains signes de sa présence mystérieuse, plus clairs pour les sens des natures angéliques, même déchues, que pour. l’humaine infirmité. Enfin, quand il jugea convenable de supprimer peu a peu ces signes de sa divinité et de se cacher plus profondément dans la nature humaine, le prince des démons conçut des doutes à son sujet et le tenta pour s’assurer s’il était le Christ; il ne le tenta du reste qu’autant que le permit Notre-Seigneur, qui voulait par là laisser un modèle à notre imparfaite humanité dont il avait daigné prendre la condition. Mais après la tentation, comme les anges, ainsi qu’il est écrit 1, se mirent à le servir, je parle de ces bons et saints anges redoutables aux esprits immondes, les démons reconnurent de plus en plus sa grandeur en voyant que, tout revêtu qu’il était d’une chair infirme et méprisable, personne n’osait lui résister.



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3. Marc, I, 24 — cf. Matthieu VIII, 29.  —1. Matthieu IV, 3-11.  




Traduction par M. SAISSET, 1869.
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Message  ROBERT. Sam 16 Jan 2016, 12:25 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XXII a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XXII.

EN QUOI LA SCIENCE DES ANGES DIFFÈRE DE CELLE DES DÉMONS.




Les bons anges ne regardent d’ailleurs toute cette science des objets sensibles et temporels dont les démons sont si fiers, que comme une chose de peu de prix, non qu’ils soient ignorants de ce côté, mais parce que l’amour de Dieu qui les sanctifie leur est singulièrement aimable, et qu’en comparaison de cette beauté immuable et ineffable qui les enflamme d’une sainte ardeur, ils méprisent tout ce qui est au-dessous d’elle, tout ce qui n’est pas elle, sans en excepter eux-mêmes, afin de jouir, par tout ce qu’il y a de bon en eux, de ce bien qui est la source de leur bonté. Et c’est pour cela qu’ils connaissent même les choses temporelles et muables mieux que ne font les démons; car ils en voient les causes dans le verbe de Dieu par qui a été fait le monde: causes premières, qui rejettent ceci, approuvent cela et finalement ordonnent tout. Les démons, au contraire, ne voient pas dans la sagesse de Dieu ces causes éternelles et en quelque sorte cardinales des êtres temporels; ils ont seulement le privilège de voir plus loin que nous dans l’avenir à l’aide de certains signes mystérieux dont ils ont plus que nous l’expérience, et quelquefois aussi ils prédisent les choses qu’ils ont l’intention de faire;  voilà à quoi se réduit leur science.



Ajoutez qu’ils se trompent souvent, au lieu que les anges ne se trompent jamais. Autre chose est, en effet, de tirer du spectacle des phénomènes temporels et changeants quelques conjectures sur des êtres sujets au temps et au changement, et d’y laisser quelques traces temporelles et changeantes de sa volonté et de sa puissance, ce qui est permis aux dénions dans une certaine mesure, autre chose de lire les changements des temps dans les lois éternelles et immuables de Dieu, toujours vivantes au sein de sa sagesse, et de connaître la volonté infaillible et souveraine de Dieu par la participation de son esprit; or, c’est là le privilège qui a été accordé aux saints anges par un juste discernement. Ainsi ne sont-ils pas seulement éternels, mais bienheureux; et le bien qui les rend heureux, c’est Dieu même, leur Créateur, qui leur donne par la contemplation et la participation de son essence une félicité sans fin. 1



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1. Sur la science des anges, voyez le traité de saint Augustin : De Gen. ad litt., n. 49-50.





Traduction par M. SAISSET, 1869.
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à suivre…

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Message  ROBERT. Dim 17 Jan 2016, 3:55 pm

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Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre IX, cap XXIII a écrit:

LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.


CHAPITRE XXIII.

LE NOM DE DIEUX EST FAUSSEMENT ATTRIBUÉ AUX DIEUX DES GENTILS,

ET IL CONVIENT EN COMMUN AUX SAINTS ANGES ET

AUX HOMMES JUSTES, SELON LE TÉMOIGNAGE DE L’ÉCRITURE.




Si les Platoniciens aiment mieux donner aux anges le nom de dieux que celui de démons, et les mettre au rang de ces dieux qui, suivant Platon 2, ont été créés par le Dieu suprême, à la bonne heure; je ne veux point disputer sur les mots. En effet, s’ils disent que ces êtres sont immortels, mais cependant créés de Dieu, et qu’ils sont bienheureux, mais par leur union avec le Créateur et non par eux-mêmes, ils disent ce que nous disons, de quelque nom qu’ils veuillent se servir. Or, que ce soit là l’opinion des Platoniciens, sinon de tous, du moins des plus habiles, c’est ce dont leurs ouvrages font foi. Pourquoi donc leur contesterions-nous le droit d’appeler dieux des créatures immortelles et heureuses ? il ne peut y avoir aucun sérieux débat sur ce point, du moment que nous lisons dans les saintes Écritures: "Le Dieu des dieux, le Seigneur a  parlé 1"; et ailleurs: "Rendez gloire au  Dieu des dieux 2 "; et encore: "Le grand Roi élevé au-dessus des dieux 3". Quant à ce passage: "Il est redoutable par-dessus tous les dieux 4", le verset suivant complète l’idée du Psalmiste, car il ajoute: "Tous les dieux des Gentils sont des démons, et le Seigneur a fait les cieux  5".



Le Prophète dit donc que le Seigneur est plus redoutable que tous les dieux; mais il entend parler des dieux des Gentils, lesquels ne sont que des démons. Ce sont ces démons à qui Dieu est redoutable, et qui, frappés de crainte, disaient à Jésus-Christ: "Es-tu venu pour nous perdre ?" Mais quand le Psalmiste parle du Dieu des dieux, il est impossible qu’il soit question du dieu des démons. De même, ces paroles: Le grand Roi élevé au-dessus de tous les dieux, ne veulent point dire au-dessus de tous les démons. D’un autre côté, l’Ecriture appelle dieux quelques hommes d’entre le peuple de Dieu: "J’ai dit : Vous êtes tous des dieux et les enfants du Très-Haut 6". Lors donc que le Psalmiste parle du Dieu des dieux, on peut fort bien entendre qu’il est le Dieu de ces dieux-là, et dans le même sens il est aussi le grand Roi élevé au-dessus de tous les dieux.



Mais, dira-t-on, si des hommes ont été nommés dieux parce qu’ils sont de ce peuple à qui Dieu parle par la bouche des anges ou des hommes, combien plus sont dignes de ce nom des esprits immortels qui jouissent de la félicité où les hommes aspirent en servant Dieu ? Que répondrons-nous à cela, sinon que ce n’est pas sans raison que la sainte Ecriture a donné le nom de dieux à des hommes plutôt qu’à ces esprits bienheueux dont on nous promet la félicité après la résurrection des corps, et qu’elle l’a fait de peur que notre faiblesse et notre infidélité, trop frappées de l’excellence de ces créatures, n’en transformassent quelqu’une en Dieu ? Or, le danger est facile à éviter, quand c’est de créatures humaines qu’il s’agit. D’ailleurs, les hommes du peuple de Dieu ont dû être nommés dieux plus clairement, afin qu’ils fussent assurés que celui qui a été appelé le Dieu des dieux est certainement leur Dieu; car, encore que ces esprits immortels et bienheureux qui sont dans le ciel soient appelés dieux, ils n’ont pourtant pas été appelés dieux des dieux, c’est-à-dire des hommes du peuple de Dieu, puisqu’il a été dit à ces mêmes hommes: "Vous êtes tous des dieux et les enfants du Très-Haut". L’Apôtre a dit en conséquence: "Bien qu’il y en ait que l’on appelle dieux, soit dans le ciel, soit sur la terre, et qu’il y ait ainsi plusieurs dieux et plusieurs seigneurs, nous n’avons qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout procède et en qui nous  sommes, et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par qui ont été faites toutes choses et nous-mêmes 1".



Il est donc inutile d’insister sur cette dispute de mots, puisque la chose est si claire qu’elle ne laisse aucune incertitude. Quant à ce que nous disons que les anges qui ont été envoyés aux hommes pour leur annoncer la volonté de Dieu sont au nombre de ces esprits bienheureux et immortels, cette doctrine choque les Platoniciens. Ils ne veulent pas croire que ce ministère convienne aux êtres bienheureux et immortels qu’ils appellent dieux; ils l’attribuent aux démons, qu’ils estiment immortels, mais sans oser les croire bienheureux; ou s’ils les font immortels et bienheureux à la fois, ce sont pour eux de bons démons, mais non pas des dieux, lesquels habitent les hauteurs célestes loin de tout contact avec les hommes. Bien que cette dissidence paraisse n’être que dans les mots, le nom de démons est si odieux que nous sommes obligés de le rejeter absolument quand nous parlons des saints anges.



Concluons donc, pour finir ce livre, que ces esprits immortels et bienheureux, qui ne sont toujours, quelque nom qu’on leur donne, que des créatures, ne peuvent servir de médiateurs pour conduire à la béatitude éternelle les misérables mortels dont les sépare une double différence. Quant aux démons, ils tiennent en effet le milieu entre les dieux et les hommes, étant immortels comme les premiers et misérables comme les seconds; mais comme c’est en punition de leur malice qu’ils sont misérables, ils sont plus capables de nous envier la béatitude que de nous la procurer. Dès lors, il ne reste aux amis des démons aucune bonne raison pour établir l’obligation d’adorer comme des aides ceux que nous devons éviter comme des trompeurs. Enfin, pour ce qui touche les esprits réputés bons, et, à ce titre, non seulement immortels, mais bienheureux, auxquels ils se croient obligés d’offrir, sous le nom de dieux, des sacrifices pour obtenir la béatitude après cette vie, nous ferons voir au livre suivant que ces esprits, quels qu’ils soient et quelque nom qu’ils méritent, ne veulent pas qu’on rende les honneurs de la religion à un autre qu’à Dieu, leur créateur, source de leur félicité.



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2. Voyez le Timée, Discours de Dieu aux dieux, tome XII de la trad. de M. Cousin, p. 137. — 1. Psaume XLIX, 1. — 2. Psaume CXXXV, 2. — 3. Psaume XCIV, 3. — 4. Psaume XCV, 4.  
5. Psaume XCV. 5. — 6.  Psaume LXXXI, 6. — 1. I Corinthiens VIII, 5-6.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques, soulignés et
gras ajoutés.
à suivre…

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FIN DU LIVRE NEUVIÈME: DEUX ESPÈCES DE DÉMONS.
ROBERT.
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