Saint Augustin, Cité de Dieu, Livre XX. — Le Jugement Dernier. (complet)

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Message  ROBERT. Lun 22 Juin 2015, 11:07 am

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XX cap. XXX a écrit:

LIVRE VINGTIÈME: LE JUGEMENT DERNIER.  



CHAPITRE XXX.


MALGRÉ L’OBSCURITÉ DE QUELQUES PASSAGES DE L’ANCIEN TESTAMENT,

OÙ LA PERSONNE DU CHRIST NE PARAÎT PAS EN TOUTE ÉVIDENCE, IL FAUT,

QUAND IL EST DIT QUE DIEU VIENDRA JUGER, ENTENDRE CELÀ DE JÉSUS-CHRIST.




 Il y a beaucoup d’autres témoignages de l’Ecriture sur le dernier jugement, mais il serait trop long de les rapporter, et il nous suffit d’avoir prouvé qu’il a été annoncé par l’Ancien et par le Nouveau Testament. Mais l’Ancien ne déclare pas aussi formellement que le Nouveau que c’est Jésus-Christ qui doit rendre ce jugement. De ce qu’il y est dit que le Seigneur Dieu viendra, il ne s’ensuit pas que ce doive être Jésus-Christ, car cette qualification convient aussi bien au Père ou au Saint-Esprit qu’au Fils. Nous ne devons pas toutefois laisser passer ce point sans preuves. II est nécessaire pour cela de montrer premièrement, comment Jésus-Christ parle dans ses prophètes, sous le nom de Seigneur Dieu, afin qu’aux autres endroits, où cela n’est point manifeste et où néanmoins il est dit que le Seigneur Dieu doit venir pour juger, on puisse l’entendre de Jésus-Christ.

Il y a un passage dans le prophète Isaïe qui fait voir clairement ce dont il s’agit. Voici en effet comment Dieu parla par ce Prophète: "Ecoutez-moi, Jacob et Israël que j’appelle. Je suis le premier et je suis pour jamais. Ma main a fondé la terre, et ma droite a affermi le ciel. Je les appellerai, et ils s’assembleront tous et ils entendront. Qui a annoncé ces choses ? Comme je vous aime, j’ai accompli votre volonté sur Babylone et exterminé la race des Chaldéens. J’ai parlé et j’ai appelé; je l’ai amené, et je l’ai fait réussir dans ses entreprises. Approchez-vous de moi, et écoutez-moi. Dès le commencement, je n’ai point parlé en secret; j’étais présent, lorsque ces choses se faisaient. Et maintenant le Seigneur Dieu m’a envoyé, et son Esprit1".


C’est lui-même qui parlait tout à l’heure comme le Seigneur Dieu, et néanmoins on ne saurait pas que c’est Jésus-Christ, s’il n’ajoutait:  "Et maintenant le Seigneur Dieu m’a envoyé, et son Esprit". Il dit cela, en effet, selon la forme d’esclave, et parle d’une chose à venir, comme si elle était passée. De même, en cet autre passage du même prophète: "Il a été conduit à la mort, comme une brebis que l’on mène à la boucherie1"; il ne dit pas: "Il sera conduit", mais il se sert du passé pour le futur, selon le langage ordinaire des Prophètes. Il y a un autre passage dans Zacharie, où il dit clairement que le Tout-Puissant a envoyé le Tout-Puissant. Or, de qui peut-on entendre cela, sinon de Dieu le Père qui a envoyé Dieu le Fils ? Voici le passage: "Le Seigneur tout puissant a dit: Après la gloire, il m’a envoyé vers les nations, qui vous ont pillé. Car vous toucher, c’est toucher la prunelle de son œil. J’étendrai ma main sur eux, et ils deviendront les dépouilles de ceux qui étaient leurs esclaves et vous connaîtrez que c’est le Seigneur tout-puissant qui m’a envoyé2".


Voilà le Seigneur tout puissant qui dit qu’il est envoyé par le Seigneur tout-puissant. Qui serait entendre ces paroles d’un autre que de Jésus-Christ, qui parle aux brebis égarées de la maison d’Israël ? Aussi dit-il dans l’Evangile: "Je n’ai été envoyé que pour les brebis perdues de la maison d’Israël3", qu’il compare ici à la prunelle des yeux de Dieu, pour montrer combien il les chérit. Parmi ces brebis, il faut compter les Apôtres mêmes, mais "après la gloire", c’est-à-dire après sa résurrection glorieuse, car avant, comme dit saint Jean l’évangéliste "Jésus n’était point encore glorifié4".

Il fut aussi envoyé aux nations, en la personne de ses Apôtres; et ainsi fut accompli ce qu’on lit dans le psaume: "Vous me délivrerez des rébellions de ce peuple; vous m’établirez chef des nations5"; afin que ceux qui avaient pillé les Israélites, et dont les Israélites avaient été les esclaves, devinssent eux-mêmes les dépouilles des Israélites; car c’est ce qu’il avait promis aux Apôtres en leur disant: "Je vous ferai pêcheurs d’hommes6"; et à l’un deux: "Dès ce moment ton emploi sera de prendre des hommes7". Ils deviendront donc les dépouilles, mais en un bon sens, comme sont celles qu’on enlève dans l’Evangile à ce Fort armé, après l’avoir lié de chaînes encore plus fortes que lui8.  Le Seigneur parlant encore par les Prophètes… à suivre.  
 



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1. Isaïe XLVIII, 12-16. — 1. Isaïe  LIII, 7, selon les Septante. — 2. Zacharie II, 8-9.  — 3. Matthieu XV, 24. — 4. Jean VII, 39. — 5. Psaume  XVII, 44.  
6. Matthieu IV, 19. — 7. Luc V, 10. — 8. Matthieu XII, 29.



Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques et
gras ajoutés.
à suivre…

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ROBERT.
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Message  ROBERT. Mar 23 Juin 2015, 3:13 pm

Saint Augustin, in La Cité de Dieu, Livre XX cap. XXX a écrit:

LIVRE VINGTIÈME: LE JUGEMENT DERNIER.  



CHAPITRE XXX.

MALGRÉ L’OBSCURITÉ DE QUELQUES PASSAGES DE L’ANCIEN TESTAMENT,

OÙ LA PERSONNE DU CHRIST NE PARAÎT PAS EN TOUTE ÉVIDENCE,

IL FAUT, QUAND IL EST DIT QUE DIEU VIENDRA JUGER, ENTENDRE CELÀ DE JÉSUS-CHRIST.




(suite) Le Seigneur parlant encore par les Prophètes: "En ce jour-là, dit-il, j’aurai soin d’exterminer toutes les nations qui viennent contre Jérusalem, et je verserai sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem l’esprit de grâce et de miséricorde; ils jetteront les yeux sur moi, parce qu’ils m’ont insulté; et ils se lamenteront, comme ils se lamenteraient au sujet d’un fils bien-aimé; ils seront outrés de douleur, comme ils le seraient pour un fils unique1". A qui appartient-il, sinon à Dieu seul, d’exterminer toutes les nations ennemies de la cité de Jérusalem, "qui viennent contre elle", c’est-à-dire qui lui sont contraires, ou, selon d’autres versions, qui "viennent sur elle", c’est-à-dire qui veulent l’assujettir ? Et à qui appartient-il de répandre l’esprit de grâce et de miséricorde sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem ? Sans doute cela n’appartient qu’à Dieu; et aussi est-ce à Dieu que le Prophète le fait dire. Et toutefois Jésus-Christ fait voir que c’est lui qui est ce Dieu qui a fait toutes ces merveilles, lorsqu’il ajoute: "Et ils jetteront les yeux sur moi, parce qu’ils m’ont insulté, et ils se lamenteront, comme ils se lamenteraient au sujet d’un fils bien-aimé, et ils seront outrés de douleur, comme ils le seraient pour un fils unique".


Car en ce jour-là, les Juifs mêmes, qui doivent recevoir l’esprit de grâce et de miséricorde, jetant les yeux sur Jésus-Christ, qui viendra dans sa majesté, et voyant que c’est lui qu’ils ont méprisé dans son abaissement, en la personne de leurs pères, se repentiront de l’avoir insulté dans sa passion. Quant à leurs pères qui ont été les auteurs d’une si grande impiété, ils le verront bien aussi, quand ils ressusciteront; mais ce ne sera que pour être punis de leur attentat, et non pour se convertir. Ce n’est donc pas d’eux qu’il faut entendre ces paroles: "Je répandrai sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem l’esprit de grâce et de miséricorde; et ils jetteront les yeux sur moi, à cause qu’ils m’ont insulté"; et pourtant, ceux qui croiront à la prédication d’Elie doivent descendre de leur race.


Mais de même que nous disons aux Juifs: Vous avez fait mourir Jésus-Christ, quoique ce crime soit l’ouvrage de leurs ancêtres; de même ceux dont parle le Prophète s’affligeront d’être en quelque sorte les auteurs du mal que d’autres ont accompli. Ainsi, bien qu’après avoir reçu l’esprit de grâce et de miséricorde, ils ne soient point enveloppés dans une même condamnation, ils ne laisseront pas de pleurer le crime de leurs pères, comme s’ils en étaient coupables. Au reste, tandis que les Septante ont traduit: "Ils jetteront les yeux sur moi, à cause qu’ils m’ont insulté", l’hébreu porte: "Ils jetteront les yeux sur moi qu’ils ont percé1"; expressions2 qui rappellent encore mieux Jésus-Christ crucifié.


Toutefois  "l’insulte", suivant l’expression adoptée par les Septante, embrasse en quelque sorte l’ensemble de la passion. En effet, Jésus-Christ fut insulté par les Juifs, et quand il fut pris, et quand il fut lié, et quand il fut jugé, et quand il fut revêtu du manteau d’ignominie, et quand il fut couronné d’épines, frappé sur la tête à coups de roseau, adoré dérisoirement le genou en terre, et quand il porta sa croix, et enfin quand il y fut attaché. Ainsi, en réunissant l’une et l’autre version, et en lisant qu’ils l’ont insulté et qu’ils l’ont percé, nous reconnaîtrons mieux la vérité de la passion du Sauveur.


Quand donc nous lisons dans les Prophètes que Dieu doit venir juger, il le faut entendre de Jésus-Christ; car, bien que ce soit le Père qui doive juger, il ne jugera que par l’avènement du Fils de l’homme. Il ne jugera personne visiblement; il a donné tout pouvoir de juger au Fils, qui viendra pour rendre le jugement, comme il est venu pour le subir. De quel autre que de lui peut-on entendre ce que Dieu dit par Isaïe, sous le nom de Jacob et d’Israël, dont le Christ est issu selon la chair: "Jacob est mon serviteur; je le protégerai; Israël est mon élu; c’est pourquoi mon âme l’a choisi. Je lui ai donné mon esprit; il prononcera le jugement aux nations. Il ne criera point, il ne se taira point; et sa voix ne sera point entendue au dehors. Il ne brisera point le roseau cassé; il n’éteindra point la lampe qui fume encore; mais il jugera en vérité. Il sera resplendissant, et ne pourra être opprimé jusqu’à ce qu’il établisse le jugement sur la terre; et les nations espéreront en lui3".  


L’hébreu ne porte pas Jacob et Israël; mais les Septante, voulant nous montrer comment il faut entendre le mot de serviteur que porte le serviteur, c’est-à-dire le profond abaissement où a daigné se soumettre le Très-Haut, ont mis le nom de celui dans la postérité duquel il a pris cette forme de serviteur. Le Saint-Esprit lui a été donné, et nous le voyons descendre sur lui dans l’Évangile, sous la forme d’une colombe1. Il a prononcé le jugement aux nations, parce qu’il a prédit l’accomplissement futur de ce qui leur était caché. Sa douceur l’a empêché de crier; et toutefois il n’a pas cessé de prêcher la vérité. Mais sa voix n’a point été entendue au dehors, et ne l’est pas encore, parce que ceux qui sont retranchés de son corps ne lui obéissent pas. Il n’a point brisé ni éteint les Juifs, ses persécuteurs, qui sont comparés ici tour à tour à un roseau cassé, parce qu’ils ont perdu leur fermeté, et à une lampe fumante, parce qu’ils n’ont plus de lumière. Il les a épargnés, parce qu’il n’était pas encore venu pour les juger, mais pour être jugé par eux2. Il a prononcé un jugement véritable, leur prédisant qu’ils seraient punis, s’ils persistaient en leur malice. Sa face a été resplendissante sur la montagne3, et son nom célèbre dans l’univers ; et il n’a pu être opprimé par ses persécuteurs, ni dans sa personne, ni dans son Eglise. Ainsi, c’est en vain que ses ennemis disent:  Quand est-ce que son nom sera aboli et périra ? Jusqu’à ce qu’il établisse le jugement sur la. terre4"


Voilà ce que nous cherchions et ce qui était caché car c’est le dernier jugement qu’il établira sur la terre, quand il descendra du ciel. Nous voyons déjà accompli ce que le Prophète ajoute: "Et les nations espéreront en son nom". Que ce fait, qui ne peut pas être nié, soit donc une raison pour croire ce que l’on nie impudemment. Car qui eût osé espérer cette merveille dont sont témoins ceux-là mêmes qui refusent de croire en Jésus-Christ, et qui grincent des dents et sèchent de dépit, parce qu’ils ne peuvent les nier ? Qui eût osé espérer que les nations espéreraient au nom de Jésus-Christ, quand on le prenait, quand on le liait et le bafouait, quand on l’insultait et le crucifiait, et enfin quand ses disciples même avaient perdu l’espérance qu’ils commençaient à avoir en lui ? Ce qu’à peine un seul larron crut alors sur la croix, toutes les nations le croient maintenant, et, de peur de mourir à jamais, elles sont marquées du signe de cette croix sur laquelle Jésus-Christ est mort.


Il n’est donc personne qui doute de ce jugement dernier, annoncé dans les saintes Ecritures, sinon ceux qui, par une incrédulité aveugle et opiniâtre, ne croient pas en ces Écritures mêmes, bien qu’elles aient déjà justifié devant toute la terre une partie des vérités qu’elles annoncent. Voilà donc les choses qui arriveront en ce jugement, ou vers cette époque: l’avènement d’Elie, la conversion des Juifs, la persécution de l’Antéchrist, la venue de Jésus-Christ pour juger, la résurrection des morts, la séparation des bons et des méchants, l’embrasement du monde et son renouvellement. Il faut croire que toutes ces choses arriveront; mais comment et en quel ordre ? L’expérience nous l’apprendra mieux alors que toutes nos conjectures ne peuvent le faire maintenant. J’estime pourtant qu’elles arriveront dans le même ordre où je viens de les rappeler.


Il ne me reste plus que deux livres à écrire pour terminer cet ouvrage et m’acquitter de mes promesses avec l’aide de Dieu. Dans le premier des deux je traiterai du supplice des méchants; dans l’autre, de la félicité des bons; et j’y réfuterai les vains raisonnements des hommes qui se croient sages en se raillant des promesses de Dieu, et qui méprisent comme faux et ridicules les dogmes qui nourrissent notre foi. Mais pour ceux qui sont sages selon Dieu, sa toute-puissance est le grand argument qui leur fait croire toutes les vérités qui semblent incroyables aux hommes, et qui néanmoins sont contenues dans les saintes Ecritures, dont la véracité a déjà été justifiée de tant de manières. Ils tiennent pour certain qu’il est impossible que Dieu ait voulu nous tromper, et qu’il peut faire ce qui parait impossible aux infidèles.


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1. Zacharie  XII, 9-10. — 1. Jean, V, 22. — 2. Ce sont celles de la Vulgate. —3. Isaïe XLII, 1-4, selon les Septante. — 1.  Matthieu III, 16. — 2. Comp. saint Jérôme, commentant Isaïe, Epist. CLI ad Algasiam.. —3. Matthieu XVII, 1-2. —4. Psaume  XL, 6.




Traduction par M. SAISSET, 1869.
italiques, gras et
soulignés ajoutés.

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FIN DU LIVRE VINGTIÈME.  
ROBERT.
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