La gymnastique - Mgr Freppel - 1886

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Message  Roger Boivin Dim 20 Déc 2015, 1:19 pm



DISCOURS PRONONCÉ À LA DISTRIBUTION DES PRIX DU PETIT-SÉMINAIRE DE MONGAZON LE 27 JUILLET 1886

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Messieurs, Chers Élèves,

Lorsque je visitai Mongazon, il y a quelques semaines, mon attention se porta sur un point qu'on peut appeler accessoire et secondaire, mais qui ne laisse pas d'avoir à mes yeux une certaine importance. Pour tout ce qui regarde la culture intellectuelle et morale, je crois que nos établissements diocésains sont arrivés à un degré de perfection relative qui, s'il n'exclut pas le progrès, témoigne d'une amélioration sérieuse et constante. Peut-être n'en est-il pas de même, dans un ordre de choses moins relevé, de quelque détail auquel nous ne prêtons pas toute l'attention qu'il faudrait. Depuis plusieurs années, l'opinion publique s'est fort préoccupée de cette partie inférieure de la pédagogie ; et si l'on ne mêlait pas à une louable pensée des éloges trop pompeux pour être complètement sincères, nous ne pourrions qu'approuver sans réserve le genre d'exercices auxquels on vient de faire une si large part dans les règlements scolaires. Toujours est-il, Messieurs, qu'on doit constamment s'appliquer à dégager le vrai et le juste de toutes les réformes que l'on propose en matière d'éducation : voilà pourquoi je voudrais vous dire un mot, non pas du règlement ou de la discipline, moins encore du vers latin ou du thème grec, mais purement et simplement de la gymnastique.

Oh ! le mot est aussi ancien que la chose elle-même. Je serais bien long, si je voulais rappeler tout ce que les Grecs entendaient par là ; si, à la suite de Vitruve, je voulais vous introduire dans l'un de leurs gymnases, pour vous en faire admirer tour à tour les salles et les portiques, outre le xyste et le stade, l'éphébéum, le coriceum, l'apodyterium, l'elacothesium, le frigidarium, le propnigeum et le laconicum. Comme nous n'avons ni l'espace ni les ressources nécessaires pour reproduire à Mongazon l'œuvre que décrivait Vitruve (liv. V, ch. II), il n'y a pas lieu d'y voir autre chose qu'un souvenir historique. Il est même juste d'ajouter que les Grecs exagéraient l'importance de la gymnastique dont ils ne craignaient pas de faire la partie prédominante de l'éducation. La conception païenne de la vie terrestre leur faisait négliger, au profit des exercices du corps, la culture autrement essentielle de l'àme. Est-ce à dire qu'il n'y ait pas un fond de vérité dans le soin que mettaient les anciens à développer un art dont d'éminents esprits, comme Platon, ne dédaignaient pas de s'occuper jusque dans les moindres détails ? Assurément non. Car enfin, dans le plan du Créateur, l'homme n'est pas un pur esprit, mais un composé d'àme et de corps ; et sous ce rapport, Montaigne n'avait pas tort de dire au 25e chapitre du 1er livre de ses Essais : « Ce n'est pas une âme, ce n'est pas un corps qu'on dresse, c'est un homme. » Il suit de là que les exercices du corps ont leur place marquée dans la vie du collège, et que la gymnastique ne saurait être indifférente au perfectionnement de tout l'être humain.

Et qu'on ne dise pas que les jeux désordonnés et sans suite où les enfants se livrent à tous les ébats de leur âge peuvent suppléer aux exercices réguliers et disciplinés de la gymnastique. Non, pas plus que les compositions où la fantaisie domine, ne sauraient remplacer, dans les exercices de l'esprit, cette autre gymnastique qui assujettit l'élève au travail méthodique des thèmes et des versions. En toutes choses, dans la culture du corps comme dans celle de l'âme, il faut de l'ordre et de la symétrie, un jeu alternatif de forces qui se balancent dans les conditions d'un équilibre parfait, une répétition d'actes qui, par leur continuité, assouplissent l'organe, l'exercent sans l'accabler, le développent en le fortifiant, et lui donnent sa forme normale, comme le prouvent ces modèles si achevés de la statuaire antique que vous cherchez à reproduire dans vos cours de dessin comme la plus belle expression de la nature et de l'art.

Il n'y a qu'une difficulté à ce que je viens de dire : c'est le budget ; car, au collège comme ailleurs, toute amélioration entraîne une conséquence financière. Mais, en élevant votre supérieur à la dignité de gymnasiarque, je sais qu'il n'est pas homme à laisser la fortune de l'établissement suspendue à un trapèze : il a plusieurs cordes à son arc ; et vous le verrez bien lorsqu'à votre retour des vacances, vous trouverez à Mongazon cette preuve nouvelle de son activité et de sa sollicitude.



OEUVRES DE Mgr FREPPEL, ÉVÊQUE D'ANGERS - Tome IX - OEUVRES PASTORALES ET ORATOIRE - VI - 1886 :

https://archive.org/stream/oeuvresdemgrfrep09frep#page/390/mode/2up


Roger Boivin
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