Aperçus de philosophie thomiste. (COMPLET)

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Message  Louis Mer 28 Déc 2011, 7:08 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

V. LES ÉLÉMENTS (suite)
Dès lors, en possession de ces premières notions, évidentes pour elle, bien qu'inaccessibles, comme telles, à la raison scientifique ou expérimentale, la raison philosophique pourra mener, au sujet des conditions profondes des changements ou mutations se produisant dans le monde minéral, une enquête que la raison scientifique ou expérimentale ne saurait conduire ou contrôler.

Elle saura, d'abord, que si l'on ne veut pas se contenter de l'explication purement quantitative et matérielle ou superficielle de Démocrite et de tous ceux qui acceptent sa théorie atomistique des changements que nous constatons dans le monde de la nature, autour de nous, il faut, de toute nécessité, reconnaître, dans le monde où ont lieu ces changements, une pluralité ou diversité de substance. Si tous les corps étaient de même nature, s'il n'y avait, pour tous, qu'une seule substance, tous les changements que nous constatons devraient se ramener à une simple question de mouvement local, comme nous avons déjà eu l'occasion de le faire remarquer. Et, dès lors, il n'y a plus qu'à s'en tenir à l'explication de Démocrite, rajeunie avec les théories des savants modernes nous parlant d'éons, d'ions et d'électrons, groupés en des sortes de systèmes planétaires infinitésimaux dont la disposition variée constituerait toutes les diversités du monde des corps.

Si, au contraire, comme le veut impérieusement le plus inaliénable bon sens, et comme le confirment, autant qu'elles le peuvent dans cet ordre transcendant qui dépasse l'expérience, toutes les opérations de la science qu'est la chimie, on admet qu'il y a, dans notre monde terrestre, au milieu duquel nous vivons, d'incessantes transformations substantielles, une conclusion inéluctable s'impose : l'impossibilité absolue de l'unité de substance dans notre monde corporel.

Et, en effet, la substance des corps…


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Message  ROBERT. Mer 28 Déc 2011, 11:27 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

V. LES ÉLÉMENTS (suite)

(...) Il n'est pas rare, en effet, de rencontrer des savants, très compétents dans le domaine de leur science, qui ignorent complètement les questions d'ordre philosophique. Non seulement ils ne se livrent pas eux-mêmes aux spéculations de la raison philosophique, ce qui s'expliquerait encore, soit parce qu'ils n'ont pas le loisir de le faire, absorbés qu'il sont par leurs travaux, soit parce que le pli de leur raison contracté dans les recherches proprement expérimentales diffère du pli de la raison qui se contracte quand on vaque à l'étude portant sur l'essence des choses qui est l'objet propre du philosophe ; mais ils ne s'y intéressent pas.(...)


https://messe.forumactif.org/t3786p120-apercus-de-philosophie-thomiste#75838


Les savants devraient être un peu moins "savants", si on peut dire, et s’intéresser davantage à la philosophie, ce qui les mènerait sûrement vers Dieu.

Les savants du temps du Père Pègues ne s’intéressaient déjà plus à la philosophie… Que dire de des savants contemporains ?
De parfaits sans-Dieu !!! Des panthéistes.

Trop de connaissances scientifiques mènent à l’indifférence religieuse qui mène finalement à la liberté religieuse, fer de lance de la religion de Jean-Baptiste, de Karol et de Ratzinger…

.


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Message  ROBERT. Mer 28 Déc 2011, 11:54 am

ROBERT. a écrit:
PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

V. LES ÉLÉMENTS (suite)

(...) Il n'est pas rare, en effet, de rencontrer des savants, très compétents dans le domaine de leur science, qui ignorent complètement les questions d'ordre philosophique. Non seulement ils ne se livrent pas eux-mêmes aux spéculations de la raison philosophique, ce qui s'expliquerait encore, soit parce qu'ils n'ont pas le loisir de le faire, absorbés qu'il sont par leurs travaux, soit parce que le pli de leur raison contracté dans les recherches proprement expérimentales diffère du pli de la raison qui se contracte quand on vaque à l'étude portant sur l'essence des choses qui est l'objet propre du philosophe ; mais ils ne s'y intéressent pas.(...)


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Les savants devraient être un peu moins "savants", si on peut dire, et s’intéresser davantage à la philosophie, ce qui les mènerait sûrement vers Dieu.

Les savants du temps du Père Pègues ne s’intéressaient déjà plus à la philosophie… Que dire de des savants contemporains ?
De parfaits sans-Dieu !!! Des panthéistes.

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Message  Louis Mer 28 Déc 2011, 1:11 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

V. LES ÉLÉMENTS (suite)
Et, en effet, la substance des corps est constituée, nous le savons philosophiquement, par l'union de ces deux principes essentiels que sont la matière première et la forme substantielle. Cette union ne peut exister que s'il y a proportion, harmonie, entre la matière première, pure puissance réceptive, et la forme substantielle dont le propre est de fixer, dans tel acte d'être, cette puissance indéterminée. D'autre part, à telle matière, ou à la matière disposée de telle sorte en vue de telle forme à recevoir en elle, devra correspondre telle quantité ou telles parties quantitatives, qui sont la propriété découlant immédiatement de la matière. Et, à telle forme substantielle, reçue en telle matière avec telle quantité, correspondront telles qualités ou formes accidentelles, qui découleront proprement de cette forme substantielle reçue dans telle matière, en vue de telle action à exercer dans le monde des corps. Mais qui ne voit que si la substance est unique dans ce monde des corps, et surtout à parties homogènes, — et d'où pourrait venir une hétérogénéité quelconque dans cette substance unique n'ayant aucune action à exercer autour d'elle, puisqu'elle seule existerait dans la nature? — à supposer qu'une action quelconque fût encore possible, avec une telle conception dans le monde des corps, cette action serait identique et aurait toujours un même effet, émanant d'un seul et même principe.

Pour qu'une action quelconque soit possible dans le monde des corps, il faut concevoir au moins deux êtres totalement, ou en parties, distincts, dont l'un aura raison de principe actif ; l'autre, de principe passif. Mais cette raison de principe actif dans l'un et de principe passif dans l'autre ne pourra se trouver que si l'un a une propriété, au moins accidentelle, que l'autre n'a pas. D'autre part, les propriétés, nous l'avons vu, découlent naturellement de la substance constituée par l'union de telle matière et de telle forme. Si donc la substance est la même, les propriétés ne sauraient être diverses. Et, par suite, nulle possibilité d'action ou de passion : ce qui est la négation même de tout ce qui tombe sous nos sens.

Toutefois, il ne suffira pas d'une distinction quelconque de substances dans le monde des corps, pour expliquer les transformations dont nos sens témoignent.

Si nous supposons…

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Message  Louis Jeu 29 Déc 2011, 7:06 am

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Si nous supposons une simple distinction de deux substances, nous pourrons bien avoir la possibilité d'une certaine action et d'une certaine passion, les propriétés de l'une des deux substances étant plutôt d'ordre passif par rapport aux propriétés de l'autre substance supposées plus actives. Mais la conséquence fatale sera que la substance aux propriétés plus actives, agissant sur la substance aux propriétés moins actives, triomphera d'elle, et, selon le concept même de transformation substantielle, amènera la dissociation de la matière et de la forme qui constituaient la première substance, substituant sa propre forme substantielle à l'autre forme substantielle dans la matière qu'elle aura dépouillée de cette autre forme substantielle. D'où il suit qu'il ne restera plus qu'une seule substance dans le monde des corps; et, après cette première manifestation, toute autre redeviendra impossible, comme dans la précédente hypothèse d'une seule substance.

Une simple distinction de deux substances dans le monde des corps ne saurait donc suffire. Il en faut, de toute nécessité, plus de deux.

Mais quel sera leur nombre? Combien faudra-t-il de ces substances premières, pour que nous puissions, rationnellement , expliquer ou justifier, quant à leur possibilité, les changements, tous les changements , que nous constatons dans le monde des corps?

C'est, ici, on le voit, et à sa place précise, la question même des éléments , au sens philosophique de ce mot.

La question des éléments, au sens philosophique de ce mot, ne doit pas se confondre avec la question des corps simples , au sens où l'on parle de corps simples dans la science expérimentale qu'est la chimie. Sans doute, par certains côtés, les deux questions se rejoignent. Mais elles ne se confondent pas.

Elles se rejoignent en ceci que les corps simples…


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Message  Louis Jeu 29 Déc 2011, 12:26 pm

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Elles se rejoignent en ceci que les corps simples comme les éléments sont conçus comme les premiers corps en lesquels se résolvent les mixtes ou les composés. Mais elles se distinguent en ce que les corps simples de la chimie sont les corps en lesquels, de fait, se résolvent, par les procédés de cette science expérimentale, les corps sur lesquels s'applique son action, ou qu'elle peut ensuite, toujours, par son action, unir à nouveau pour constituer de nouveaux composés ou mixtes.

Les éléments, au contraire, selon qu'il faut les entendre dans leur sens proprement philosophique, sont les tout premiers corps, exigés par la raison, pour que soient justifiés, aux yeux de cette raison, quant à leur possibilité, tous les changements que nous constatons dans le monde de la nature. Il importera peu, ici, que ces éléments soient expérimentés, c'est-à-dire retrouvés, tels quels, soit à l'usage naturel et simple de nos sens, soit en nous aidant de toutes les ressources de l'expérimentation scientifique. Il se pourra fort bien qu'ils soient, selon les exigences que découvrira et fixera la raison, sans qu'il soit possible à l'expérience de les contrôler, si, d'aventure, ils n'existent pas séparés mais seulement à l'état de combinaison, et que la science n'ait pas le moyen de les retrouver à l'état pur.

Cette distinction posée, tout le monde sait que les corps simples de la chimie sont en nombre assez imposant. On en compte, pour le moment, environ 80. Il serait assurément difficile de donner une explication rationnelle de ce nombre des corps simples et de leurs natures respectives selon que la chimie les formule. Serait-il possible d'essayer, à la lumière de la seule raison philosophique, de se faire une idée, une notion quelque peu précise et fondée, de cette question des premiers corps dans le monde de la nature, à parler de ces premiers corps selon qu'on les appellera, de leur nom philosophique, des éléments?

Et, tout d'abord, il sera bon de ne pas confondre cette question des éléments, au sens philosophique, avec ce qu'on appelait autrefois et qu'on appelle encore assez souvent, dans le langage ordinaire, du même mot. Les éléments que nous cherchons ne devront pas se confondre avec les quatre éléments désignés sous les noms usuels d'eau, d'air, de terre et de feu.

Non pas, certes, que ces quatre éléments…


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Message  Louis Ven 30 Déc 2011, 6:50 am

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Non pas, certes, que ces quatre éléments, au sens usuel, n'existent dans la nature et n'aient une part d'action prépondérante dans les effets ou transformations qu'il s'agit d'expliquer. On peut même dire que c'est vraiment par eux que tout s'explique. C'est bien l'action et la réaction incessante de l'eau, de l'air, de la terre et du feu, tels qu'ils tombent sous nos sens, qui amènent les transformations dont il s'agit. Mais ces corps, tels qu'ils tombent sous nos sens, ne sont pas les tout premiers corps, puisque eux-mêmes se résolvent en d'autres corps, plus simples, ces corps simples dont nous parlions tantôt au sujet de la chimie, et que la chimie a tirés, en effet, de l'air, de l'eau et des autres corps terrestres, en les décomposant. Du reste, même alors qu'ils n'avaient pas à leur service le contrôle des expériences faites par la chimie, Aristote et saint Thomas avaient déjà remarqué qu'en usant de ces mots : air, eau, terre et feu, et en les appliquant aux éléments, que la philosophie recherchait, il ne fallait pas les confondre avec ce que nous désignons, parmi nous, de ces mêmes noms : attendu, disaient-ils, que les éléments premiers ne se retrouvaient pas à l'état pur, selon qu'ils servent à notre usage :

« Le feu, déclarait expressément saint Thomas, ne vient pas à notre usage selon qu'il se trouve dans sa matière propre, car, de ce chef, il est éloigné de nous; mais seulement en tant qu'il existe dans une matière étrangère », et donc mêlé aux autres éléments ou aux corps terrestres dans lesquels il se manifeste (Cf. Supplément, q. 74, art. 2, ad 1).

Cette remarque est d'une grande importance, pour dégager la question philosophique des éléments, telle que l'avait scrutée le génie d'Aristote, d'une certaine imagination enfantine sous laquelle voudraient la concevoir des esprits peu avertis.

Or, envisageant la question en elle-même…

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Message  Louis Ven 30 Déc 2011, 12:09 pm

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V. LES ÉLÉMENTS (suite)
Or, envisageant la question en elle-même, du point de vue strictement philosophique et à la lumière de sa puissante raison, voici comment Aristote était parvenu à la résoudre.

Il partait de ce principe que les tout premiers corps destinés à expliquer, par leurs actions et réactions, toutes les transformations du monde de la nature, devaient se reconnaître aux propriétés exigées par ces actions et réactions.

D'autre part, les corps n'agissent les uns sur les autres que par voie de contact. Il faut, de toute nécessité, un certain contact, médiat ou immédiat, du corps qui agit sur le corps qu'il modifie par son action.

Puisqu'il s'agit de contact, si nous voulons juger sûrement des propriétés qui devront se trouver dans les premiers corps, à l'effet de tout expliquer dans les transformations du monde de la nature dues à l'action de ces propriétés ou des corps auxquels ces propriétés appartiennent, un moyen par excellence s'offre à nous : c'est celui de notre sens du toucher.

Voyons donc quelles sont les premières qualités tangibles…


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Message  Louis Sam 31 Déc 2011, 6:50 am

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Voyons donc quelles sont les premières qualités tangibles qui peuvent ou doivent affecter ou qui affectent en effet notre sens du toucher. En étudiant ces premières qualités, Aristote, d'accord avec ce dont témoigne le langage commun parmi les hommes, avait pu les ramener à quatre : le froid et le chaud; le sec et l'humide.

Ces qualités tangibles ne sont pas des substances. Le froid et le chaud, le sec et l'humide ne doivent pas être conçus comme des réalités existant par elles-mêmes dans le monde des corps. Ce sont des formes accidentelles, des modes d'être, un certain état, par lequel se manifestent à notre sens du toucher, en agissant sur lui par mode de contact réel, les réalités substantielles du monde des corps. Et c'est parce que ces qualités ou ces formes accidentelles se révèlent à nous par le sens du toucher que nous pourrons en déduire leur nécessité dans les actions ou réactions du monde des corps qui doivent s'expliquer par un certain contact des corps les uns sur les autres.

Ces qualités tangibles étant les plus universelles, au témoignage de notre sens du toucher, celles qui sont à la base de toutes les autres et que toutes les autres supposent, il s'ensuit que selon leur combinaison possible devront pouvoir s'expliquer toutes les combinaisons nécessaires à l'action ou à la réaction des corps les uns sur les autres, dans l'ordre des mouvements d'altération et de transformations substantielles existant dans le monde des corps.

II est aisé de voir que le chaud et le froid ne sauraient se combiner et exister ensemble, comme propriétés naturelles d une même substance corporelle. Le chaud et le froid, en effet, s'excluent l'un l'autre. Et s'ils se trouvent ensemble quelque part, c'est en raison d'une diversité de sujets ou de parties dans un même sujet. De même pour le sec et l'humide. Il s'ensuit qu'à supposer une combinaison possible entre ces propriétés, dans un même sujet, nous ne pourrons avoir d'autres combinaisons que le froid et le sec, ou le sec elle chaud, ou l'humide et le froid, ou l'humide et le chaud. Mais ces quatre combinaisons demeurent parfaitement possibles. II y a même ceci que, combinées de la sorte, ces propriétés nous apparaissent dans un certain rapport d'activité et de passivité qui pourront permettre que les corps dont elles seront les propriétés aient tour à tour et les uns par rapport aux autres, la raison de principe actif et de principe passif; ce qui expliquera excellemment que dans certaines conditions facilitant ou contrariant leur action ils pourront alternativement triompher les uns des autres et amener par là ces premières transformations substantielles qui ouvriront la voie à toutes les autres.

Nous avons dit que ces propriétés…

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Message  Louis Sam 31 Déc 2011, 12:05 pm

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Nous avons dit que ces propriétés n'étaient que des formes accidentelles. Et c'est pour cela qu'il n'y aura aucun inconvénient à les supposer combinées deux par deux, selon qu'il vient d'être dit, dans une même substance, n'ayant qu'une forme substantielle, comme le requiert de toute nécessité l'unité substantielle de l'être corporel.

La substance à laquelle appartiendra distinctement chacune des quatre combinaisons possibles ne sera connue de nous que par la possibilité même de la combinaison. Il y en aura quatre selon le nombre de ces combinaisons elles-mêmes. Quant au nom que nous pourrons leur donner, ce sera celui des corps où dominent, parmi nous, les combinaisons qui leur appartiennent en propre. Ainsi, l'on appellera feu, la substance qui aura pour propriétés le chaud et le sec; air, la substance qui aura pour propriétés le chaud et l'humide ; eau, la substance qui aura pour propriétés l'humide et le froid ; terre, la substance qui aura pour propriétés le froid et le sec.

Telle est cette doctrine ou théorie philosophique des éléments, des quatre éléments premiers devant se trouver à la base de toutes les transformations du monde des corps, mise en si haut relief par le génie d'Aristote et que Thomas d'Aquin a exposée avec tant de maîtrise.

Ne pourrait-on pas trouver comme un indice expérimental de cette théorie philosophique…

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Message  Louis Dim 01 Jan 2012, 6:44 am

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Ne pourrait-on pas trouver comme un indice expérimental de cette théorie philosophique dans le fait, aujourd'hui démontré par la science, que l'être le plus parfait qui existe dans notre monde des corps sur la terre, savoir l'être humain, est lui-même, quant à sa partie corporelle, un composé des quatre corps simples qui s'appellent l'oxygène, l'hydrogène, le carbone et l'azote ? Non pas, sans doute, que ces quatre corps simples de la chimie soient l'équivalent absolu des quatre éléments de la raison philosophique. Mais si les quatre corps simples dont il s'agit peuvent expliquer, par leur combinaison dans le composé humain, toutes les merveilles de notre corps, sera-t-il plus difficile d'admettre que toutes les variétés du monde de la nature s'expliquent par les combinaisons de quatre premiers corps simples correspondant aux éléments que la raison philosophique conçoit et justifie?

L'opposition des propriétés actives et passives existant, selon qu'elles peuvent se combiner entre elles, dans les tout premiers corps de la nature où se produisent les transformations que nos sens constatent, explique la possibilité de ces transformations. Toutefois, quand il s'agit de l'apparition d'une nouvelle forme substantielle d'ordre supérieur, comme sera toute nouvelle forme substantielle des mixtes dans la nature, même à ne les considérer que dans le règne minéral, la présence des propriétés qui découlent de la forme substantielle des éléments ne peut suffire à l'expliquer. Il y faut une vertu supérieure, qui se trouve en fait concrétée dans l'action des corps stellaires, au premier rang desquels, comme influence active, se place l'action du soleil sur notre terre. Les qualités actives et passives des éléments, dans cette production des nouveaux corps que sont les mixtes, ont seulement raison de dispositions matérielles, comme l'avait excellemment remarqué saint Thomas. Il s'en explique en termes formels, dans la première partie de la Somme théologique, q. 115, art. 3, ad 2.

Et ce point de doctrine si essentiel est la raison de cet autre enseignement absolument…

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Message  Louis Dim 01 Jan 2012, 1:07 pm

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V. LES ÉLÉMENTS (suite)
Et ce point de doctrine si essentiel est la raison de cet autre enseignement absolument propre à Aristote et à saint Thomas, parmi tous les philosophes, qui nous montre les formes substantielles des éléments et de tous autres composants dans la production d'un corps nouveau d'ordre supérieur, ne disparaissant point d'une façon totale, mais demeurant virtuellement dans le mixte, par leurs propriétés qui ont concouru à la production du mixte, à titre de dispositions matérielles, et qui, une fois introduite la nouvelle forme substantielle, sont mises à son service, élevées elles-mêmes à un nouveau degré de perfection, du fait qu'elles appartiennent à cette nouvelle forme supérieure et qu'elles sont ses propriétés.

Et c'est ainsi que par ces additions des propriétés des premiers corps, préparant les nouveaux corps, à titre de dispositions matérielles, mises ensuite, surélevées, au service de la nouvelle forme substantielle supérieure, nous avons la clé philosophique de cette merveilleuse évolution ou ascension du monde matériel, qui, parti des premiers éléments, aboutit à travers tous les règnes de la nature — minéral, végétal, animal — jusqu'à la substance de l'être humain où la matière sera élevée à ce degré de dignité d'être unie substantiellement à une âme spirituelle.

Mais n'anticipons pas. La suite de notre élude aura précisément pour objet de nous faire assister à cette merveilleuse ascension.
A suivre : VI. LA VIE

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Message  Louis Lun 02 Jan 2012, 7:14 am

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VI. LA VIE
Nous finissions notre précédente étude sur ce mot, d'apparence étrange au premier abord, mais si riche de doctrine philosophique, dans la pensée aristotélicienne et thomiste : l'ascension de la matière.

Et c'est bien véritablement d'une ascension de la matière qu'il s'agit, ascension qui n'existe et n'a de sens que dans la doctrine si profonde, marquée par nous, dès notre premier pas dans l'étude du monde corporel, où l'on affirme que ce monde des corps ne s'explique que par l'union, en chacun des êtres qui le composent, de deux principes substantiels, la matière et la forme, unis entre eux, dans les êtres qui composent notre monde terrestre, de telle sorte qu'ils peuvent être séparés, et amener, sous l'action de causes proportionnées, d'incessantes transformations, où les premiers êtres qui disparaissent font place à des êtres nouveaux.

Dans ces transformations, le point de départ, nous l'avons vu, est constitué par des premiers corps, de nature différente, pouvant agir les uns sur les autres à l'effet de se dépouiller réciproquement de la forme substantielle qui les fait être, et, par les combinaisons de leurs propriétés, amener des dispositions matérielles qui permettront à des causes motrices supérieures d'y introduire, ou plutôt d'y réduire en acte une forme substantielle nouvelle. Chaque fois qu'apparaîtra ainsi, dans le monde des corps, un être nouveau dont la forme substantielle le fixera dans un degré d'être supérieur, aura dû se produire l'intervention d'une cause supérieure, ayant en elle un degré d'être et de vertu qui, seul, expliquera naturellement cette apparition du nouvel être.

C'est qu'en effet…

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Message  Louis Lun 02 Jan 2012, 12:50 pm

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VI. LA VIE (suite)
C'est qu'en effet, ce sont les formes substantielles qui fixent les degrés d'être. Et nulle forme substantielle nouvelle, apportant avec elle un nouveau degré d'être, ne se peut expliquer, si ce n'est par l'action d'une cause supérieure ayant en elle, dans sa vertu active, de pouvoir, en effet, amener à l'acte d'être ce nouveau degré d'être qui n'était qu'en puissance dans les dispositions matérielles. Même quand il s'agit du seul règne minéral, toute apparition de nouvelle forme substantielle ou plutôt de nouvel être corporel, fixé dans un degré d'être supérieur ou plus parfait par une nouvelle forme substantielle, fera que l'intervention dont nous parlons s'imposera avec une nécessité absolue.

Cette cause supérieure, qui intervient ainsi, dans l'ordre des causes matérielles qui tombent sous nos sens, n'est pas autre que l'action des corps célestes, notamment du soleil, selon les variations rythmées d'éloignement ou de rapprochement qu'on croyait résulter autrefois des mouvements des corps célestes tournant autour de notre terre et que la science d'aujourd'hui affirme résulter du mouvement diurne de notre terre tournant sur elle-même et de son mouvement annuel de translation autour du soleil.

Comme nous l'avons déjà fait remarquer au sujet du temps, le résultat est absolument le même pour l'intervention dont nous parlons, que le rapport de rapprochement et d'éloignement, ou, comme s'exprime saint Thomas, « de présence et d'absence », soit dû au mouvement des corps célestes ou au mouvement de la terre, attendu que le rapport reste identique.

Et, aussi bien, dans les deux cas, la formule donnée par saint Thomas s'applique dans toute sa rigueur, savoir qu' « il est nécessaire d'affirmer un principe actif de mouvement qui, par sa présence et son absence, cause la variété en ce qui est de la génération et de la corruption des corps inférieurs; et ce principe n'est pas autre que l'action des corps célestes ». Le texte est de trop grande importance, et trop d'esprits, même fort distingués, courent risque de se méprendre sur son véritable sens, pour que nous ne donnions pas la formule du saint Docteur dans la teneur de sa propre langue : Necesse est ponere aliquod principiam activum mobile, quod per suam præsentiam et absentiam causet varietatem circa generationem et corruptionem inferiorum corporum; et hujusmodi sunt corpora cælestia (1, q. 115, a. 3, ad 2).

Cette intervention d'un agent supérieur dans le monde des corps, et de l'agent que vient de nous marquer ici saint Thomas…

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Message  Louis Mar 03 Jan 2012, 5:57 am

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Cette intervention d'un agent supérieur dans le monde des corps, et de l'agent que vient de nous marquer ici saint Thomas, pour faire qu'apparaissent, en acte ou dans la réalité parfaite, les nouveaux êtres qui n'étaient qu'en puissance plus ou moins prochaine dans les dispositions de la matière qu'amène le jeu des propriétés actives et passives des premiers corps simples ou éléments, est le dernier mot de tout, dans l'ordre des causes corporelles, pour expliquer ce qui se passe et dont nos sens témoignent dans le monde de la nature. Aussi bien peut-on dire que c'est là une vérité d'évidence. Le retour des saisons à chaque renouvellement de l'année en est la démonstration aveuglante.

Il est vrai que c'est surtout dans un certain ordre des transformations constatées à la surface de notre globe que cette démonstration éclate plus particulièrement manifeste: dans l'ordre de la vie. Mais cela même va mettre dans une nouvelle lumière la grande vérité philosophique sur l'ordre des choses ou les divers degrés d'être et l'ascension de la matière dans notre monde corporel.

Nous avons dit que toute forme substantielle nouvelle porte avec elle un nouveau degré d'être qu'elle fait apparaître dans la matière où il n'était préalablement qu'en puissance ; que, du reste, cette puissance de la matière va s'enrichissant toujours de virtualités nouvelles à mesure que demeurent en elle les propriétés des formes précédentes, mises au service de la nouvelle forme, dès que celle-ci, sous l'action d'un agent proportionné, se trouve réalisée en fait dans la matière où elle était en puissance.

Mais quel sera cet agent proportionné?...


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Message  Louis Mar 03 Jan 2012, 12:12 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Mais quel sera cet agent proportionné? Nous avons nommé les corps célestes, dont l'action sur notre terre est d'une efficacité si universelle, si souveraine, si profonde, si absolue. Toutefois, nous l'avons dit aussi, cette efficacité ne s'exerce qu'à l'endroit d'une matière prédisposée et selon les dispositions de cette matière. Un aspect de ces dispositions nous est apparu dans le jeu des propriétés que nous avons marqué devoir se trouver en premier dans les éléments ou corps simples, et ensuite, progressivement, selon les degrés mêmes de l'ascension de la matière, dans les divers composés ou mixtes qui résultent, sous l'action des corps célestes, des éléments ou corps simples combinés entre eux.

Mais suffira-t-il de ces dispositions ascendantes et de l'action des corps célestes pour tout expliquer dans l'évolution ultérieure du monde de la matière sur notre terre? Et, par exemple, de même que, dans les conditions que nous venons de dire, la matière a évolué des premiers corps simples ou éléments jusqu'aux mixtes les plus parfaits dans le règne minéral, dirons-nous que, dans ces mêmes conditions et sans aucune entremise ou intervention d'agent nouveau ou de condition matérielle nouvelle, cette matière pourra continuer d'évoluer, passant du règne minéral au règne végétal, du règne végétal au règne animal et jusqu'au règne humain lui-même?

C'est, on le voit, la question même de la vie, qui se pose à nous maintenant, de son apparition dans le monde de la nature, de ses degrés, des conditions de sa transmission et de sa permanence.

Disons, tout de suite, que, pour saint Thomas, le passage du règne minéral au règne végétal ou même animal dans ses premiers degrés les plus infimes, était considéré comme possible dans les conditions marquées jusqu'ici, sans qu'il fût besoin de dispositions nouvelles dans la matière ou d'agent nouveau dans le monde des corps. Ce sentiment était imposé au saint Docteur par ce que nous appellerions les données de l'expérience. Il n'avait pas, pour le fixer, la ressource des expériences scientifiques telles que les a réalisées de nos jours le génie de Pasteur.

A ne juger que par le témoignage des sens, on voyait apparaître, dans le monde de la nature, de nouveaux êtres vivants, plantes ou animaux, en des milieux où ne semblait intervenir aucun vivant de même espèce, soit par son action directe, soit par des germes qu'il y aurait laissés. De certaine matière en putréfaction, sous la seule action de la chaleur solaire, émergeaient de nouveaux vivants, sans qu'on pût se rendre compte qu'aucun germe de vie eût préexisté dans ces milieux. Et, pour autant, on disait qu'ils étaient produits sans vivant de même espèce, uniquement de la matière minérale selon qu'elle se trouvait disposée par une évolution préalable, et que l'action des corps célestes amenait à l'acte d'être, dans cette matière, la forme substantielle d'ordre nouveau qu'était l'ordre ou le degré de l'être vivant, dont il est très certain qu'en effet, d'une certaine manière, il est en puissance dans les dispositions ou virtualités des êtres corporels inférieurs du monde des mixtes perfectionnés.

Il est aisé de voir que dans cette conception…

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Message  Louis Mer 04 Jan 2012, 6:31 am

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VI. LA VIE (suite)
Il est aisé de voir que dans cette conception la forme substantielle nouvelle du vivant qui apparaissait était toujours attribuée à une cause ou à un agent supérieur à la matière ; puisque aussi bien, nous l'avons vu, aucune transformation substantielle, dans le monde de la nature, même pour les premières transformations amenant les premiers mixtes, n'était tenue comme possible en dehors de cette intervention d'un agent supérieur. La question pouvait être et pourrait être encore, dans l'ordre théorique, de savoir si l'action de cet agent supérieur, qui suffisait pour les transformations du monde purement minéral, pouvait suffire aussi pour cette transformation nouvelle introduisant la vie, même à l'un de ses degrés inférieurs.

Du temps de saint Thomas, la question était résolue par ce qu'on estimait être le fait d'expérience. Aujourd'hui, le fait d'expérience, précisé par le génie de Pasteur, exclut qu'il y ait de ces sortes de vivants apparaissant dans les conditions supposées. Toute apparition nouvelle de vivant, à quelque degré de vie qu'on le prenne, doit s'expliquer désormais par l'action d'un germe ou d'une semence, portant déjà la vie en puissance.

Resterait donc de savoir si, en soi, il y a impossibilité radicale à ce que la vie se manifeste, sur notre terre, dans les conditions supposées réelles autrefois. La question ainsi posée, il semble bien difficile d'y répondre avec une absolue certitude. Dès là que le vivant corporel, et surtout dans les premiers degrés de vie, est un composé de matière et de forme; que cette forme d'ordre nouveau, qui porte avec elle la vie, n'en garde pas moins la raison de forme substantielle, proportionnée à une matière, qui, dans son premier fond, n'est pas autre que la matière des éléments et des mixtes ; que les premières transformations de cette matière ou plutôt des premiers corps où était cette matière avec la forme des éléments et des mixtes ont pu se faire sous l'action des agents supérieurs qui sont les corps célestes; ne pourrait-il pas se trouver, dans la vertu de ces corps célestes, une efficacité suffisante pour faire passer la matière de l'état des mixtes supérieurs à celui des premiers degrés de vie? On ne voit pas que rien en soi permette de l'exclure d'une façon absolue.

Si le fait de ce passage existait, comme le croyaient les anciens sur les données d'une expérience imparfaite, aucune impossibilité préalable ne saurait être invoquée au nom de la raison. Étant donné que le fait n'existe pas, nous devons conclure, semble-t-il, que la vertu en question ne se trouve pas, en fait, dans l'action des corps célestes.

Mais rien ne nous autorise à affirmer, d'une façon absolue, au nom de la seule raison, qu'une telle vertu ne saurait s'y trouver. Et si jamais une expérience en sens contraire s'imposait, nous n'aurions à renier aucun principe établi par la raison philosophique dans l'ordre des transformations substantielles.

Toutefois, …

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Message  Louis Mer 04 Jan 2012, 12:19 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Toutefois, les données de l'expérience scientifique étant ce qu'elles sont maintenant, nous devons admettre qu'en fait, pour l'apparition de la vie et sa transmission, il ne suffit pas des dispositions de la matière, même élevée jusqu'au plus haut degré du règne minéral, et de l'action des corps célestes, mais un nouveau principe, ou une nouvelle cause, un nouvel agent doit ici intervenir : et c'est un vivant de même espèce. La conclusion était aussi admise dans toute sa rigueur, par saint Thomas, lorsqu'il s'agissait des vivants plus parfaits. Il ne nous déplaît pas que l'expérience scientifique l'étende aujourd'hui, sans exception, a tout le domaine des vivants, y compris les végétaux eux-mêmes.

C'est qu'aussi bien il ne sera pas de meilleur argument pour réfuter, du point de vue même de la science expérimentale, la doctrine de ceux qui voudraient que la vie ne fût qu'une manifestation nouvelle des seules forces physico-chimiques du monde de la nature. Le 8 février 1923, le journal des Débats publiait un article dans lequel était posée cette question : Quelle différence y a-t-il entre le minéral et le végétal, entre l'animé et l'inanimé, dans le monde des corps? L'auteur signalait la réponse de certains professeurs de Sorbonne enseignant que « la vie de l'être animé repose uniquement (lui-même soulignait le mot) sur les forces physico-chimiques ».

On voit, tout de suite, la portée de cette réponse…

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Message  Louis Jeu 05 Jan 2012, 6:40 am

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VI. LA VIE (suite)
On voit, tout de suite, la portée de cette réponse. Si la vie ne dépasse point la vertu des forces physico-chimiques, tout, dans le monde de la vie, devra pouvoir s'expliquer par le simple jeu de ces mêmes forces. Et comme le simple jeu des forces physico-chimiques ne dépasse point la sphère du monde minéral, la vie elle-même ne sera qu'une modalité de ce même monde. Entre le minéral et le végétal, il n'y aura pas une différence essentielle, générique; ce ne sera qu'une différence accidentelle, une différence de modalité dans le même genre, dans la même espèce d'action et d'être. La conception d'Aristote et de saint Thomas et la formule que nous en a laissée leur génie va nous apparaître tout autre. Elle n'est, du reste, que la suite logique du premier regard si profond jeté par eux sur la nature de l'être corporel.

Dès notre premier pas dans cette étude du monde corporel, nous avons pu nous convaincre, nous le rappelions tout à l'heure, que l'être corporel était composé de deux principes essentiels, dont l'un, la matière, expliquait ce qu'il y avait de passivité ou de réceptivité dans l'être corporel, tandis que l'autre, la forme, expliquait ce qu'il y avait de perfection en lui ; avec ceci, du reste, qu'à mesure qu'on monterait dans la perfection par la réception d'une forme plus excellente dans la matière, la matière elle-même devrait être conçue comme enrichie de virtualités plus hautes en harmonie avec cette nouvelle forme.

Il suit de là que, pour résoudre la question posée de savoir quelle différence existe entre le minéral et le végétal, nous devons nous demander si dans les deux existe un même genre ou une même qualité de forme substantielle proportionnée à une semblable disposition de matière, ou si, au contraire, dans les deux, les dispositions de la matière et la qualité de la forme doivent être tenues pour foncièrement différentes.

D'autre part, nous le savons, la matière première et la forme substantielle des êtres corporels ne nous sont pas accessibles directement et en elles-mêmes. C'est par leurs propriétés, par les facultés d'action qui en découlent, que nous pouvons les connaître. Et ces propriétés ou ces facultés elles-mêmes sont connues de nous par leurs opérations. Encore est-il que l'opération est spécifiée par son objet, par cela même sur quoi elle s'exerce.

Si donc nous voulons connaître la qualité de la forme du vivant, du végétal, et la disposition de sa matière, par comparaison à la matière et à la forme ou à la nature du minéral, c'est l'objet de leurs actions ou de leurs opérations que nous devons étudier directement et tout d'abord.

L'étude attentive de cet objet nous révèle une différence, nous allions dire une opposition irréductible…

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Message  Louis Jeu 05 Jan 2012, 2:16 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
L'étude attentive de cet objet nous révèle une différence, nous allions dire une opposition irréductible.

Dans le minéral, l'objet de son action est quelque chose d'extérieur à lui. Son action est essentiellement transitive. Elle consiste à perfectionner ou à modifier quelque chose qui est étranger à lui, extérieur. Qu'il s'agisse de mouvement local, de mouvement d'altération, de mouvement de transformation substantielle, le sujet de ces mouvements ou ce sur quoi ils portent n'est pas le minéral qui agit; c'est un autre être, un autre corps, qu'il atteint par son action, et que, par cette action, il modifie, le changeant de place, ou l'altérant dans ses qualités accidentelles, ou enfin le dépouillant de sa forme substantielle pour en introduire une autre dans le sujet, dans la matière, où se trouvait d'abord la forme précédente.

Dans l'action du végétal, comme tel, nous assistons à un phénomène exactement contraire. Ici, l'action a pour objet non pas un être extérieur au sujet qui agit, mais ce sujet lui-même. C'est au-dedans de lui, non au dehors, que l'action se fait. L'action n'est plus transitive; elle est immanente.

Il est vrai qu'elle supposera encore des actions extérieures et transitives. Le végétal tire du dehors le suc dont il vivra; par son action, il l'altère, il le transforme ; mais ce n'est point pour en faire quelque chose, hors de lui, et où se trouverait plus ou moins sa ressemblance : car tout effet porte la ressemblance de sa cause. Ce n'est pas cela. S'il attire à soi le suc du dehors, s'il l'altère, s'il le transforme, c'est pour l'absorber en lui, c'est pour en faire sa propre substance, c'est pour qu'il devienne lui-même considéré dans son identité numérique.

D'un mot, l'action du végétal, comme tel, c'est l'alimentation. Le végétal s'alimente. Son action consiste à s'alimenter. Et ce qui la spécifie, ce qui en est l'objet, à le prendre dans son sens le plus formel, c'est l'aliment. Le végétal se définit par l'aliment ou en fonction de l'aliment.

Or, l'aliment…

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Message  Louis Ven 06 Jan 2012, 7:12 am

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VI. LA VIE (suite)
Or, l'aliment, l'alimentation, la fonction de s'alimenter, au sens pur et simple de ce mot, au sens où il comprend le végétal comme tel, selon toute l'étendue de son être, de son agir, implique trois étapes, trois stades, trois actes. L'être qui s'alimente a pour traits caractéristiques essentiels, qu'il se nourrit, qu'il croît, et qu'il se reproduit. Se nourrir, croître, se reproduire, voilà les trois fonctions du végétal. Ces fonctions sont distinctes. Elles sont tellement distinctes qu'elles peuvent ne pas coexister en même temps. Le végétal continue de se nourrir, alors qu'il a cessé de croître. Et il est un temps où il se nourrit et croît sans être encore à même de se reproduire.

Les fonctions étant distinctes, il faudra, dans le végétal, des principes immédiats de ces fonctions, qui ne soient pas les mêmes. C'est ce que nous appellerons les puissances ou facultés du végétal.

Mais, par cela même qu'elles sont multiples et que d'ailleurs elles nous apparaissent comme le principe immédiat des fonctions dont il s'agit, elles ne peuvent pas se confondre avec ses principes essentiels, matière et forme, dont le propre est de fixer l'être du végétal.

Toutefois c'est de ces principes essentiels, matière et forme, très spécialement de la forme, que dériveront, à titre de propriétés, les trois principes immédiats des fonctions. Et, comme ces principes sont multiples, avec un objet immédiat distinct, pour la réalisation duquel il faudra un organe proportionné, de là vient que, dans les dispositions de la matière, ou de la quantité, qui découle immédiatement de la matière, il faudra une différence de nature dans les parties destinées à l'une et à l'autre de ces trois fonctions.

Le végétal sera donc un tout corporel…

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Message  Louis Ven 06 Jan 2012, 12:39 pm

PHYSIQUE ET MÉTAPHYSIQUE

VI. LA VIE (suite)
Le végétal sera donc un tout corporel à parties hétérogènes selon la diversité des organes requis pour les trois puissances d'agir qui sont ses propriétés inaliénables. Et, par là, il se distinguera essentiellement du minéral, qui est un tout corporel dont les parties sont homogènes et dont les principes essentiels n'ont aucun besoin de fonctions surajoutées en vue de fonctions à remplir à l'intérieur du sujet. S'ils ont des propriétés actives et passives, c'est uniquement en fonction de l'action à exercer sur un sujet extérieur à celui qui agit.

De là vient que la forme substantielle du vivant, fixant l'être du végétal dans ce degré nouveau de perfection, d'un ordre si transcendant par rapport à l'être du minéral, prendra aussi un nom nouveau, marquant l'inauguration d'un monde nouveau, le monde de la vie. On l'appellera du nom d'âme.

Cette âme appartient, elle aussi, ou monde des corps, au monde de l'être mobile, au monde de la nature, au monde physique. Elle est un des deux principes essentiels qui constituent l'être du vivant corporel. Et, à ce titre, elle est, en toute vérité, une forme substantielle. Elle joue, dans le vivant corporel, le même rôle que jouaient les précédentes formes substantielles dans le monde des corps, depuis les premiers corps que sont les éléments, jusqu'aux mixtes les plus parfaits. C'est elle qui fixe dans son être le vivant corporel. Elle porte avec elle tout ce que portaient les précédentes formes en fait de perfection. Seulement, elle y ajoute ce degré nouveau, qui spécifie le vivant et le constitue lui-même : la vie. En même temps que forme substantielle faisant être, elle est aussi, elle est, proprement, principe vital.

Et c'est pour cela qu'avec elle, et à partir de ce premier degré dans le monde de la vie qui est celui du végétal, la forme substantielle ne s'appelle plus seulement du nom de forme substantielle, comme dans les êtres inférieurs; elle s'appelle, nous l'avons dit, du nom d'âme.

Aristote a pu la définir…

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Message  Louis Sam 07 Jan 2012, 6:32 am

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VI. LA VIE (suite)
Aristote a pu la définir : l'acte premier d'un corps physique organique pouvant exercer les opérations de la vie. Elle est acte premier, comme toute forme substantielle, fixant le sujet dans l'être, et ne disant pas seulement une perfection accidentelle dans l'ordre de l'agir, qui est l'acte second. Elle est l'acte premier ou la forme substantielle d'un corps physique ou réel parmi les substances du monde de la nature, et non pas seulement mathématique ou dans l'ordre de l'étendue abstraite. Et ce corps physique est organique, a des parties hétérogènes, faites pour exercer les diverses opérations vitales qui sont le propre du vivant, savoir : se nourrir, croître et se reproduire, quand il s'agit du premier degré de vie tel qu'il convient au végétal.

Il est aisé de voir, après cette analyse philosophique telle que nous la devons au génie d'Aristote et de saint Thomas, que la question de savoir s'il existe une différence entre le végétal et le minéral se trouve résolue. La différence est si grande qu'on pourrait dire qu'un abîme les sépare, même en rapprochant du vivant le plus infime le minéral le plus parfait. Ce sont deux mondes distincts. Et le second, le monde de la vie, même dans son premier degré qui est celui du végétal, est tellement supérieur, dans l'ordre de la perfection, qu'à supposer, comme le veut la science d’aujourd’hui, que notre soleil ne soit qu'un immense métal à l'état de fusion dans lequel toute vie est impossible et que les étoiles qui brillent dans notre firmament soient, elles aussi, des soleils analogues, un brin d'herbe cueilli sur notre terre, où nous apparaissent les opérations de la vie, doit être tenu, comme tel, pour chose plus excellente et plus parfaite, dans la hiérarchie des degrés d'être.

Mais peut-être ces professeurs de Sorbonne dont parlait l'auteur de l'article du journal des Débats que nous avons cité, voudraient s'inscrire en faux contre l'analyse philosophique d'Aristote et de saint Thomas, au sujet de la vie.

Cette analyse, nous l'avons vu, repose tout entière sur le fait que le vivant, le végétal s'alimente. Si, d'aventure, le minéral aussi s'alimentait, du même coup se trouverait ruinée toute l'argumentation que nous venons de reproduire.

Or, il en est qui veulent qu'en effet le minéral aussi s'alimente. Ne disons-nous pas couramment, au sujet du feu, qu'il se nourrit; qu'il croît même, dans la mesure où on lui fournit un nouvel aliment ; et que, dans les proportions où il croît, il peut se multiplier et engendrer autour de lui d'autres feux, qui sont ce qu'il est lui-même?

Oui, on dit cela, en effet…


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Message  Louis Sam 07 Jan 2012, 1:32 pm

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VI. LA VIE (suite)
Oui, on dit cela, en effet. Mais on ne le dit pas, on ne peut pas le dire dans le même sens où on le dit quand on parle du vivant véritable qu'est, même au degré de vie le plus infime, le végétal. On dit cela du végétal, au sens propre. On ne le dit du minéral, quel qu'il soit, que dans un sens figuré ou métaphorique. Et, en effet, même pour le feu, où ces expressions viennent surtout usitées, il ne s'agit que d'une lointaine analogie avec le phénomène vital constaté dans le vivant proprement dit. Quand nous disons du feu qu'il s'alimente, le mot feu ne désigne pas un être substantiel formant un tout individuel. Il désigne un ensemble de matières soumises à l'activité d'un corps plus chaud qui les consume, en leur communiquant sa propre chaleur. Encore est-il qu'en se communiquant à des matières nouvelles, la chaleur cesse d'être dans les premières qui se consument successivement et disparaissent. Ce seront des morceaux de bois qui brûleront successivement, et en brûlant ainsi conserveront la chaleur ou le feu dans un même foyer. Si donc il y a ici unité, c'est seulement en raison du foyer où se consument successivement ces divers corps; et il ne s'agit là, on le voit, que d'une certaine unité d'emplacement.

Dans le végétal, au contraire, c'est un même sujet substantiel et individuel qui s'unit, en l'absorbant et en la faisant sienne, une substance étrangère, la transformant en sa propre substance individuelle. Ici nous avons, au sens propre, un phénomène d'absorption, qui n'a rien de commun avec la substitution de nouveaux corps combustibles venant remplacer au fur et à mesure les premiers qui se consument et disparaissent. Ou, s'il y a substitution de parties à parties, c'est au sein d'un même tout substantiel dont la forme substantielle préside elle-même à cette substitution selon qu'il convient à la conservation et au perfectionnement du tout.

Il est vrai qu'un élément commun, non métaphorique, celui-là, semble se trouver…

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Message  Louis Dim 08 Jan 2012, 6:46 am

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VI. LA VIE (suite)
Il est vrai qu'un élément commun, non métaphorique, celui-là, semble se trouver, de part et d'autre, dans le phénomène du végétal qui s'alimente au sens propre, et du feu dont nous disons aussi, par métaphore, qu'il s'alimente ou se nourrit. Cet élément commun, d'ordre très réel, au sens propre, c'est l'action de la chaleur. La même chaleur semble se trouver dans le feu qui s'empare des nouveaux combustibles et dans le végétal qui dissout, par un vrai travail de décoction, l'aliment qu'il s'assimile. Nous disons le végétal, bien que cette action du calorique se manifeste plutôt dans le phénomène d'alimentation qui est celui de l'animal. Ale considérer dans l'animal, il ne fait, du reste, que donner plus de force à l'objection ; puisque aussi bien la vie de l'animal étant plus parfaite, si le phénomène de l'alimentation chez lui est dû à l'action d'une chaleur semblable à celle du feu, les conditions de la vie en général pourront donc être ramenées à la simple action des forces ou des agents physico-chimiques dans la nature.

L'objection n'est pas nouvelle. Saint Thomas se l'était déjà faite. Et il a aussi formulé la réponse.

Cette réponse est une simple application de la grande doctrine aristotélicienne qui commande tout dans l'ordre des choses de la nature vu à la lumière de la raison philosophique. La chaleur dont il est ici question est une qualité ou forme accidentelle de certains corps. Mais toute qualité ou forme accidentelle agit en dépendance de la forme substantielle des corps dont elle est la propriété. Si donc la forme substantielle porte avec elle dans un corps un degré d'être supérieur, les qualités actives qui seront les propriétés de ce corps auront une vertu bien autrement grande et produiront des effets bien autrement précieux. De là vient que la même qualité active appelée du nom de chaleur, étant au service de la forme substantielle d'un corps inférieur au monde de la vie, produira des effets d'un ordre bien inférieur à celui des effets qu'elle produira, mise au service d'une forme substantielle supérieure comme est l'âme du vivant. Aussi bien la chaleur animale, dans le vivant, contribuera à transformer en chair l'aliment matériel qu'elle consume ; tandis que la chaleur purement physico-chimique du monde minéral ou des éléments n'aboutira jamais qu'à la mise en acte, dans la matière, d'une forme substantielle de même ordre.

Oui, vraiment, le vivant est…


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Bienheureux l'homme qui souffre patiemment la tentation, parce qu'après avoir été éprouvé, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l'aiment. S. Jacques I : 12.
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